Vocabulaire de termes régionaux pour la Champagne

Champagne: LE champagne est un vin, dont l'appellation est strictement protégée et dont l'élaboration suit des procédures parfaitement codées; UNE champagne est le même mot que campagne, c'est-à-dire une étendue de champs, mais dans le sens particulier d'espace découvert, nu, par opposition aux espaces boisés ou bocagers. LE champagne tire son nom de LA Champagne, qui tire le sien de son paysage depuis deux millénaires. Il existe d'ailleurs des champagnes ou campagnes dans bien d'autres régions françaises, comme la Campagne de Caen ou les Champagnes charentaises, dont viennent des appellations de cognac (fine champagne) sans aucun rapport avec LE champagne, mais associés à UNE champagne. Noter que la mode actuelle dans la presse, qui voudrait que l'on ne «sable» plus le champagne mais qu'on le «sabre», est une pure stupidité propagée par des personnes manquant quelque peu de culture. On sablait en effet le champagne au 17e siècle, bien avant que les soudards russes ne découvrent que l'on pouvait déboucher les bouteilles au sabre, manière assez peu cavalière de cavaliers bruts. Sabler voulait alors dire: jeter d'un coup le contenu du verre au fond du gosier, et ne se limitait pas au champagne. Jacques le fataliste «en chemise et pieds nus, avait sablé deux ou trois rasades sans ponctuation» (Diderot), «Ce vieux Crésus, en sablant du champagne, Gémit des maux que souffre la campagne; Et, cousu d'or, dans le luxe plongé, plaint le pays de tailles surchargé» (Voltaire, Épître LXXVI, à Madame Denis, 1748); il existe bien d'autres citations de cette expression alors courante; sabler voulait dire jeter le métal fondu dans un moule de sable, d'où l'image. C'est l'équivalent de «lamper», tout aussi figuré. Bien entendu, rien ne vous empêche de sabrer une bouteille de champagne, bien qu'en général le champagne mérite mieux; c'est peut-être plus martial, ce n'est pas le même geste. Mieux vaut sabler que sabrer.

Chavée: ravin profond, terme argonnais.

Clôteux: artisan cloutier jadis en Ardenne.

Croyette: sables cimentés en grès dans les terrains secondaires des Crêtes préardennaises, équivalent de la gaize argonnaise.

Cuve: vallon court et ample en forme de cirque, échancrant les grands versants des crêtes du Tardenois et du Laonnois et développée à la faveur du soutirage des sables sous la carapace de calcaire grossier; c'est un site de villages.

Drache: forte averse (terme ardennais).

Gaize: roche assez dure, grès formé par la consolidation d'anciens sables du Secondaire; c'est elle qui soutient les reliefs de l'Argonne.

Grévière: carrière ouverte dans les alluvions des rivières et les nappes de fragments calcaires des plaines champenoises; c'est la forme locale de la gravière. La grève est le nom habituel des épandages de petits fragments calcaires, issus de la gélivation, qui couvrent certains versants et datent en grande partie des périodes froides du Quaternaire

Hurlu: petite plante caractéristique des savarts (Sinapis alba).

Pouillot ou pouille: variété de serpolet de la Champagne crayeuse, dont le nom avait servi à qualifier la Champagne crayeuse, dès lors considérée comme «pouilleuse».

Rièze: fond marécageux dans le massif ancien ardennais, équivalent de fagne.

Savart: lande champenoise, à peu près complètement disparue depuis les reboisements du 19e siècle et les arrachages de la seconde moitié du 20e siècle.

Sedan: nom (ancien) d'une étoffe de laine, fine et généralement unie, souvent noire, jadis spécialité de la ville de Sedan.

Somme: source, en Champagne crayeuse.

Voyotte: ruelle, spécialement à Saint-Dizier

Wez: gué (en Ardennes).

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