Vocabulaire de termes régionaux pour la Franche-Comté

Affouage: répartition par feu (famille) des produits de la forêt dans de nombreuses communautés jurassiennes; le terme n'est pas propre à la région.

Baroichage: communauté civile et religieuse ancienne dans le Jura; le nom dérive de paroisse et fut porté spécialement par la communauté de Pontarlier, que dirigeaient des «barons bourgeois», non nobles mais jouissant de franchises à l'instar des nobles.

Cancoillote: fromage fondu fabriqué à partir de la présure du lait entier (méton) puis affiné; il est livré en pots d'environ 200 grammes. Le nom vient de la prononciation comtoise du «caillé».

Chalot: grenier à grains isolé, en bois et toit de lauzes, dans le Sud des Vosges et région sous-vosgienne vers Saint-Loup-sur-Semouse; un inventaire de 325 unités a été réalisé par l'Association «le Pays du Chalot», sise aux Forges dans les Vosges et certains sont en voie de restauration.

Clavelin: bouteille de 62 centilitres utilisée pour le vin jaune du Jura, jadis dénommée «anglaise». Sa production fut une spécialité de la verrerie de La Vieille-Loye jusqu'à sa fermeture en 1931. Le nom vient d'un patronyme répandu en Jura. La normalisation européenne a failli en avoir raison, mais les vignerons jurassiens ont réussi à faire entendre raison à la Commission en 1984.

Cluse: passage plus ou moins étroit, tranchant un mont dans le Jura et faisant ainsi communiquer deux vals; certaines sont empruntées par des rivières, et parfois ont des allures de défilés ou de gorges, dominés par de hautes parois calcaires; il advient que des combes soient évidées à partir de cluses.

Combe: en général, dépression topographique assez marquée; spécialement en relief jurassien: partie d'un mont que l'érosion a réussi à évider dans les terrains tendres du pli sous la carapace de la couche dure de calcaires, dont les rebords escarpés sont alors des crêts.

Comtoise: célèbre horloge traditionnelle, de forme haute et à balancier de cuivre, qui fut une spécialité des villages des hauts plateaux jurassiens.

Crêt: en général, relief dissymétrique vigoureux, correspondant à la partie haute d'une couche dure inclinée, laissée en relief par l'érosion; la paroi du crêt est généralement abrupte, son revers est moins incliné. En relief jurassien, les crêts dominent une combe, ou forment les rebords externes d'un val perché (ou synclinal perché).

Culée: v. Reculée

Emposieu: puits naturel, gouffre dans les pays calcaires du jura; équivalent d'aven ou igue dans les Causses; contrairement à ce qu'écrivent certains sites suisses, ce n'est nullement l'équivalent d'une doline, qui est une petite dépression fermée de faible profondeur  dont les eaux s'écoulent parfois par un emposieu, mais pas nécessairement.

Fruitière: à la fois coopérative et fromagerie dans le massif jurassien, surtout pour la fabrication du comté, à la taille d'un village ou d'un gros hameau.

Joux: terme général pour de grandes forêts, notamment de résineux.

Layetier: artisan qui fabriquent des layettes, c'est-à-dire de menus objets et surtout des boîtes en bois, plutôt longues et plates, spécialement pour l'horlogerie, la mercerie et divers emballages, même de fromages; le mot reste employé dans le Jura du côté des Rousses et notamment à Bois-d'Amont (musée de la Boissellerie).

Méton: v. Cancoillote.

Mont: au sens très général du terme, s'ajoute en relief jurassien un sens particulier qui correspond au relief d'un pli anticlinal dont la couche dure reste continue; les formes en sont très variables selon la structure du pli (symétrique, dissymétrique, «coffré» et dans ce cas présentant un plateau sommital, etc. Certains monts sont tranchés par des cluses.

Pessière: forêt d'épicéas.

Reculée: relief en forme de cirque, caractéristique des têtes de vallée échancrant un puissant escarpement de terrains calcaires, et dont la forme tient en partie aux circulations souterraines des eaux en roche perméable; on dit aussi culée, voire cul, c'est le même mot imagé, mais reculée est euphémisé et met l'accent sur l'érosion régressive.

Ruz: échancrure torrentielle au flanc d'un mont en relief jurassien; en réalité ce mot est assez peu employé et, localement, a simplement le sens de vallon.

Sotolon: v. Vin jaune.

Surséance: acte par lequel on surseoit à une attribution ou à une action. Une terre en surséance était une terre dont les souverains prétendant à sa possession renonçaient provisoirement à faire valoir leurs droits. Au pied de la Vôge, plusieurs petits fiefs autour de Saint-Loup-sur-Semouse, de Vauvillers à Fougerolles, très disputés entre Lorraine et Franche-Comté (donc Empire) après la mort de Charles le Téméraire, se sont trouvés ainsi en surséance, et donc ni français, ni lorrains, ni comtois, de la fin du 15e siècle à des dates variables, allant jusqu'au début du 18e s.: deux siècles de quasi-indépendance dans un espace tampon, qui fut en général préservé des guerres, notamment des ravages du 18e siècle, et put prospérer assez tranquillement en tirant parti des échanges entre Vosges et plaines, et des industries de l'époque. Il en est resté sans doute quelque chose dans l'accumulation d'ateliers et de savoir-faire, voire dans la réussite de certaines entreprises. Une zone franche avant la lettre, mais dans le bon sens, celui de l'abri et de la paix.

Tuyé, ou tué: grande cheminée de pierre au centre de la maison rurale comtoise, dont elle supportait le toit et qu'elle chauffait en entier; elle servait aussi au fumage des charcuteries. Plusieurs «fermes à tuyé» sont classées et certaines servent de musées, comme celle du Montagnon à Fournet-Luisans (canton de Pierrefontaine-les-Varans) ou celle de Grand-Combe-Châteleu dans le canton de Morteau.

Val: au sens très général du terme, s'ajoute en relief jurassien un sens particulier qui correspond au relief d'un pli synclinal plus ou moins évasé.

Velle: radical assez fréquent dans les noms de villages comtois, et qui n'est qu'une forme d'évolution de la villa gallo-romaine.

Vin jaune: le vin jaune de Chalon vieillit durant six ans sous un voile de levure qui assure sa madérisation, consécutive à l'apparition du sotolon. Ce composé chimique (4,5-diméthyl.3-hydroxy.2(5H).furanone), formé par l'évolution d'un acide aminé, la thréonine, en présence de l'éthanol, donne au vin son goût de noix (ou de rancio) caractéristique. Titrant au moins 13°, le vin jaune est issu de raisins du cépage savagnin, dont on ne cultive guère que 50 ha dans 5 communes, sur les marnes bleues à bancs calcaires du Lias supérieur; il est livré en clavelins de 62 centilitres; la production est strictement contrôlée: la récolte de 2001, de qualité insuffisante, a été entièrement déclassée. On fait aussi autour de Château-Chalon du vin de paille, qui n'est cependant pas une appellation, mais un vin corsé (plus de 14,5°) obtenu à partir de grappes séchées pendant six semaines sur paille ou sur claie.

Vy: forme d'évolution de l'ancien vicus gallo-romain, qui se trouve en Franche-Comté dans des noms de villages et qui équivaut au vic d'autres régions (ou gui en Bretagne).

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