Clermont-Ferrand

(149 900 Clermontois, 4 267 ha) est la préfecture du Puy-de-Dôme. La ville, devenue l’une des plus solides métropoles régionales françaises, ne s’est vraiment étoffée et épanouie qu’à partir de la fin du 19e siècle. Les parties assez nettement distinctes qui la composent révèlent d’ailleurs la complexité de ses origines et de sa structure. En bordure de Limagne, elle occupe une sorte de bassin, délimité à l’ouest par la plate-forme du socle cristallin qui porte les puys, au nord par les reliefs couronnés de laves du Chanturgue, au sud par ceux de Gergovie: une dizaine de kilomètres, dont Clermont n’a longtemps occupé qu’une petite fraction.

Au milieu de ce bassin, en effet, un modeste relief montant à 407 m fut le site de l’oppidum arverne Nemessos, plus tard Augustonemetum et finalement Clermont, une évocation de bois sacré. Cette butte à peine sensible porte la cathédrale du 13e s., connue pour ses murailles et ses deux flèches de lave noire, ainsi que par ses vitraux anciens, le tout très remodelé par Viollet-le-Duc, qui fit notamment élever les flèches. La présence de l’évêché depuis le 9e siècle avait attiré nombre de couvents puis, un peu à l’est, la basilique de Notre-Dame du Port (11e-12e s.). Une ville dominée par le clergé s’étendit, surtout à l’ouest de la cathédrale, parmi les jardins; des moulins se fixèrent le long de la Tiretaine, qui court un peu au nord de la butte.

Pendant ce temps, les comtes d’Auvergne avaient leur château fort sur une autre butte, 3 km au NE; ils choisirent au début du 13e siècle de le flanquer d’une bastide, au plan quadrillé et à quatre portes, nommée Montferrand. C’est là que s’installèrent les marchands, tandis que le pouvoir civil se renforçait encore plus au nord, à Riom. Clermont et Montferrand furent ensuite réunies en 1630, peu après la naissance du plus célèbre des Clermontois, Blaise Pascal (1623-1662), parti à Paris en 1631. L’ensemble prit le nom de Clermont-Montferrand, qui évolua vers le curieux résumé Clermont-Ferrand; mais le centre des activités restait Montferrand, ce qui explique que les beaux hôtels bourgeois de la ville soient dans ce que l’on nomme aujourd’hui le Vieux Montferrand, tandis que Clermont a peu de monuments civils renommés en son centre. Et c’est l’apparition des usines Michelin à la fin du 19e siècle, reprenant un atelier Barbier et Daubrée installé sur la Tiretaine entre les deux noyaux originels, qui fit la jonction tout en concrétisant la distance et la différence; la vaste usine des Carmes y occupe toujours 14 ha et celle de Cataroux 55 ha.

Au centre de Clermont, la place de la Victoire dégage les abords de la cathédrale, flanquée au nord de l’hôtel de ville et à l’ouest d’un ensemble de ruelles et du marché; peu de belles maisons, si ce n’est un hôtel du 18e s. (Chazerat), la maison de Savaron du 16e, et le musée historique et scientifique Ranquet. Cet ensemble, dominé par la cathédrale et la basilique, porte encore quelques traces de l’ancienne enceinte, visibles par exemple au tracé courbe du boulevard Desaix, qui longe préfecture et hôtel du département. Un peu plus loin, une autre ceinture de forme oblongue et de grand axe nord-sud entoure des extensions du 19e siècle, par la place de Jaude, établie sur le site d’un ancien maar, et les boulevards de Gaulle et Mitterrand puis Trudaine; elle englobe au sud le gros centre commercial Jaude, l’hôtel-Dieu et le bel ensemble formé par le jardin Lecoq et les musées Lecoq (histoire naturelle) et Bargoin (archéologie, tapis d’art); au nord, elle se confond avec l’anneau central le long des jardins et de la fontaine d’Amboise. Une autre ceinture de boulevards, plus récente, d’environ 2 km de diamètre, entoure le tout en frôlant à l’est la gare, dépassant au nord la Tiretaine et les fontaines pétrifiantes de Saint-Alyre; elle englobe ainsi le plus ancien site des usines Michelin, et au sud nombre de bâtiments militaires, hospitaliers et universitaires, dont les facultés de droit et de lettres.

Le «Vieux» Montferrand est très différent, beaucoup plus limité mais très riche en maisons anciennes et hôtels bourgeois dans son petit quadrilatère de rues en damier; la place Marcel Sembat marque le site du château disparu, près du vaste et riche musée d’art qui porte le nom du professeur et écrivain Roger Quillot (1925-1998), spécialiste d’Albert Camus, sénateur et maire socialiste de la ville, ministre de l’urbanisme en 1981.

L’agglomération s’est considérablement étendue au 20e siècle, remplissant tout le bassin en englobant notamment la butte boisée du parc de Montjuzet au nord-ouest, contournant les reliefs du Chanturgue au nord, s’insinuant dans les vallons autour de Beaumont au sud, Royat et Chamalières à l’ouest, et multipliant les parcs d’activité et les grands ensembles dans la plaine à l’est, sur le territoire des communes voisines; de sorte qu’il devient difficile de faire la part de chacune dans l’espace urbanisé: l’université et les grandes écoles, l’aéroport (Aulnat), de nombreux centres de recherche, les usines Michelin sont entièrement ou partiellement hors des limites communales clermontoises.

La commune elle-même inclut à l’est la moitié de l’emprise aéroportuaire, la base INRAE de Crouël et le gros dépôt des Archives de l’Armée de Terre; l’A71, qui longe les zones industrielles des Brézets, y a de gros échangeurs. Au nord-est, où ont été installés le centre commercial Nord, la médiathèque de la Croix-de-Neyrat et le célèbre stade de rugby Gabriel Montpied, elle va assez loin en direction de Gerzat et inclut l’usine Michelin de Chantemerle. Au nord-ouest, non loin du parc de Montjuzet, ont pris place l’École nationale de police et l’IUFM; à l’ouest mais très près du centre-ville, l’hôpital psychiatrique de Fontgiève et un lycée. Au sud s’étendent les vastes installations du centre hospitalier universitaire et régional, avec les facultés de médecine et de pharmacie. Au sud-est, grand parc technologique de la Pardieu et centre commercial de la Pardieu, lycée technique.

Michelin reste de loin le premier employeur industriel, avec 10 400 salariés. Dans la commune de Clermont-Ferrand, il est suivi par l’Atelier industriel de l’Aéronautique (AIA, 1 200 sal.) qui dépend de l’Armée de l’Air et de l’Espace et assure l’entretien de nombreux avions militaires; le groupe de presse La Montagne (500 sal.); les tuyaux de plastique et caoutchouc Trelleborg (480 sal., suédois); les transports urbains de l’agglomération (T2C, 740 sal.). Dans l’industrie apparaissent aussi le laboratoire Théa (médicaments, 410 sal., groupe d’ophtalmologie de la famille Chobret), ACC (Ateliers de construction du Centre, matériel ferroviaire, ingénierie et maintenance, 170 sal., repris en 2019 par TTH et Cegelec Défens), la construction aéronautique RJ Aéro (110 sal.), les emballages GCA (110 sal.); dans l’agro-alimentaire, la beurrerie Canda (180 sal., groupe Sodiaal); plus des entreprises de bâtiment comme Mazet (200 sal.), Assemblia (180 sal.) Eurovia (120 sal.).

Un grand nombre d’entreprises se situent dans le secteur tertiaire. Le commerce est dominé par les hypermarchés Leclerc (630 et 320 sal.), Auchan (240 sal.), Géant Casino (190 sal.), Carrefour (90 sal.), Intermarché (50 sal.) et les grands magasins tels que Galeries Lafayette (120 sal.), Ikea (190 sal.), Décathlon (110 sal.), Leroy-Merlin (150 sal.), Fnac (80 sal.), Metro (890 sal.). Dans les services financiers se signalent la Caisse d’Épargne (250 sal.), le Crédit Mutuel (250 sal.), la Banque Populaire (240 sal.), la Banque de France (140 sal.); informatique Atos (170 sal.), Cegi Alfa (200 sal.), Lojelis (120 sal.), contrôles Apave (110 sal.); conseils Appuy (150 sal.), Eramet (110 sal.); portage Centre France (280 sal.), travail temporaire Adecco (120 sal.); nettoyages Onet (600 sal.), Derichebourg (440 sal.), GSF (360 sal.), TFN (280 sal.), Onyx (220 sal.), Anetra (100 sal.) et les gardiennages PAG (310 sal.), Agir (220 sal.); publicité Milee (200 sal.); La Poste (730 sal.), Orange (360 sal.), Enedis (710 sal.). Clermont-Ferrand a aussi sur son territoire une série de grands garages et plusieurs transporteurs: Onet Logistique (330 sal.), Multi-Transport d’Auvergne (160 sal.), Millet (160 sal.), Ziegler (110 sal.).

Clermont-Ferrand a un gros centre hospitalier universitaire et régional (7 000 emplois, 1 400 lits disponibles) et plusieurs cliniques de 640 lits en tout, dont les cliniques des Dômes (340 sal.), la Plaine (75 sal.), Vitalia (70 sal.), les Chandiots (70 sal.), des institutions pour enfants et déficients sensoriels. des maisons de retraite dont Orpea (80 sal.) et Renouard (75). L’université Clermont Auvergne compte 40 000 étudiants, 6 sites dont Aurillac, Montluçon, Moulins, Le Puy-en-Velay et Vichy. L’ensemble couvre toute la gamme des enseignements. Plusieurs grandes écoles et autres institutions la complètent: ENITA (École des ingénieurs des travaux agricoles, 300 étudiants), École nationale supérieure de chimie, École nationale des impôts, ISIMA (informatique et modélisation), IFMA (Institut français de mécanique avancée, 500 étudiants), CUST (Centre universitaire des sciences et techniques), CNAM (Conservatoire national des arts-et-métiers), etc. L’Institut national de la recherche agronomique maintient des installations dans son domaine initial de Crouël à l’est de la commune, mais s’est surtout développé ensuite au Theix (Saint-Genès-Champanelle).

L’armée est représentée à Clermont par le 13e BSMAT (matériel, 880 personnes avec les détachements de Moulins et Fourchambault) et le 92e régiment d’infanterie (1 200 personnes). La ville est représentée au haut niveau du sport-spectacle par l’ASM (Association sportive montferrandaise) et tout au sommet du rugby (8 fois en finale de championnat de France et vainqueur en 2010, titulaire du Bouclier européen en 1999, de la Coupe de la Ligue en 2001 et de trois titres au challenge Du Manoir), et une équipe de football de deuxième division (Clermont Foot Auvergne, créé en 1990 et fortement soutenu par la ville, l’agglomération et la région). La première, créée en 1911 par Marcel Michelin et multisports, reste étroitement liée à la firme Michelin, dont elle porte les couleurs jaune et bleu, mais les soutiens locaux lui font à présent porter le nom d’ASM Clermont-Auvergne (70 salariés).

La ville s’est équipée d’un palais des Congrès (place du Premier Mai) et offre, comme toute grande ville qui se respecte, une gamme étendue de manifestations culturelles, dont un festival du film de court métrage et un festival de rock. Les efforts d’urbanisme n’ont pu encore empêcher que plusieurs quartiers soient déclarés «prioritaires»: Croix-de-Neyrat et les quartiers Nord sous Chanturgue, Fontaine du Bas et Herbet à l’est, Saint-Jacques au sud — les beaux quartiers sont plutôt à l’ouest, vers la montagne et les banlieues riches de Royat et Chamalières. La population de la commune, qui était de 30 000 hab. au début du 19e siècle, avait atteint 45 000 en 1883, et dépassé 50 000 en 1900; elle a ensuite bondi à 112 000 en 1931, et culminé à 157 000 en 1975; puis elle a diminué jusqu’en 1990 mais a un peu repris depuis; la population officielle totale de 2023 a 8 900 habitants de plus que celle du recensement de 1999.

La communauté d’agglomération de Clermont-Ferrand, devenue Clermont Auvergne Métropole, réunit 21 communes et 296 200 habitants. L’arrondissement, réduit en 2015, compte 362 500 hab. et 73 communes sur 91 261 ha. L’attraction de la métropole auvergnate se fait sentir jusqu’au sud de la Nièvre, au nord de la Lozère et à l’est de la Creuse, mais elle est plus limitée du côté oriental, en raison de la puissance de Lyon et de Saint-Étienne.

Six nouveaux cantons ont pour bureau Clermont-Ferrand. Chacun a une fraction de la commune, sans autre addition de commune. Chacun a entre 22 500 à 27 000 hab.

Michelin à Clermont-Ferrand.

Au bord de la Tiretaine, Aristide Barbier (1800-1863) et Édouard Daubrée (1797-1864) avaient une petite entreprise de machines agricoles, qui s’est ensuite intéressée au caoutchouc et s’est mise à fabriquer des balles pour enfants grâce à une invention du chimiste Mackintosh, oncle de Mme Daubrée, qui était écossaise. Les frères Édouard et André Michelin (1859-1940 et 1853-1931), petits-fils de Barbier, ont hérité de l’affaire en 1889 et su découvrir les possibilités de marchés ouvertes par l’apparition du pneu de bicyclette, puis du pneu pour automobiles à la fin du 19e siècle, plus tard en 1929 ces autorails sur pneus nommés «michelines»; ils ont su aussi appliquer à leur expansion des méthodes publicitaires nouvelles, symbolisées notamment par le bonhomme Bibendum (1898) et la création des guides et cartes Michelin (à partir de 1900) et la distinction des restaurants de qualité. L’entreprise clermontoise avait 5 000 salariés en 1914, 18 000 en 1925, 28 000 en 1950. Elle a absorbé la firme Citroën en 1935 (revendue au groupe Peugeot en 1974), et son directeur de l’époque y conçut la fameuse 2 CV. Elle a multiplié ensuite acquisitions et implantations en France et à l’étranger, intégrant notamment les Pneus Laurent (1964), Wolber (1972), Kléber (1981), Uniroyal-Goodrich (1990) et des entreprises en Pologne, Hongrie, Allemagne, Colombie et Russie dans les années 1990. Le groupe emploie 125 000 personnes dans le monde, dispose de 74 usines dans 19 pays et possède six plantations d’hévéas au Brésil et au Nigeria. La firme est devenue le premier producteur international, avec près de 200 millions de pneus produits par an, plus de 20% du marché mondial et un chiffre d’affaires de 24 milliards d’euros. Clermont-Ferrand reste le siège et le principal foyer, en plusieurs unités jouxtant Montferrand, les Carmes (14 ha), Cataroux (55 ha), la Combaude (15 ha), Estaing et Chantemerle, plus le centre d’essais de Ladoux.

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