collectivité territoriale de la République française; 186 400 hab. (2007), 376 km2. Les habitants sont les Mahorais. Mayotte est une île tropicale à l’ouest de l’Océan Indien; ou, plus exactement, un petit archipel. Elle est située par 12°50’S et 45°10’E, environ 320 km au nord-ouest de Madagascar et 480 km de la côte orientale de l’Afrique, ou encore à environ 1 500 km de la Réunion. La température moyenne est de 25 °C, avec un maximum de janvier-mars, et une hauteur de précipitations assez modérée, mais variable, de l’ordre de 1 300 mm par an, dans une ambiance humide, avec une saison plus sèche de mai à octobre. L’île principale, ou Grande-Terre, d’origine volcanique, et de formes très contournées, occupe 363 km2 et son altitude s’élève à 653 m au mont Bénara; elle mesure 43 km de long, dans le sens nord-sud, et 20 km de large au maximum, 2,5 km au minimum à la hauteur de Chirongui. Cette île est bordée de récifs frangeants sur tout son pourtour, soit environ 160 km; elle est entourée d’un lagon de 1 100 km2, l’un des plus étendus au Monde, profond de quelques dizaines de mètres (maximum 93 m) et limité par un récif barrière assez continu, qu’ouvrent une douzaine de passes. Ce récif barrière se situe entre 800 et 5 000 m de l’île et son plateau occupe 211 km2. Près de la grande île au nord-est, un petit relief volcanique émerge du récif et forme l’île de la Petite-Terre (11 km2), où s’était fixé à partir de 1792, en position défensive, le chef-lieu de l’archipel, Dzaoudzi. De plus petites îles émergent du récif, comme Mtsamoro au nord-ouest, ou du lagon, comme les deux Choazil entre Mtsamoro et la Grande Terre, ou Mbouzi au nord-est, ainsi que plusieurs îlots. Cet ensemble fait partie de l’archipel des Comores, et en occupe l’angle sud-est; la plus proche des trois autres grandes îles, Anjouan, est à 60 km au nord-ouest. Le nom de Mayotte est réputé avoir un rapport avec un maouti d’origine arabe, qui évoque la mort, celle des nombreux naufragés qui ont péri sur ses récifs. L’île a été peuplée principalement par des populations d’origine africaine et malgache, souvent des esclaves des marchands et seigneurs arabes; environ 70% des natifs parlent le shimaoré, de la famille bantou-swahili, 24% le bushi (ou shibushi, kibushi) qui appartient à la famille malgache et qui se cantonne aux villages du sud et de l’ouest de l’île principale. Mais la présence arabe, qui remonte au 12e siècle, s’est imposée dans la religion, les patronymes et les institutions, la quasi-totalité de la population étant musulmane et les pouvoirs traditionnels ayant été ceux des sultans et des cadis. Mayotte, attaquée en 1792 par des groupes malgaches, n’avait plus guère que 3 000 hab. au début du 19e siècle, la plupart réfugiés sur Petite-Terre. Elle a été la première île comorienne vendue à la France en 1841 par le sultan, qui avait pu reconquérir la Grande-Terre en 1833. Le protectorat s’est étendu au reste des Comores en 1866, puis l’archipel a été considéré comme colonie en 1912, annexé alors à Madagascar, et transformé en Territoire d’outremer en 1946. Le chef-lieu de l’archipel, d’abord à Dzaoudzi, a été transféré ensuite à Moroni, ce qui a contribué à une impression de marginalisation de l’île dans l’archipel. Les discussions, revendications et manifestations ultérieures ont abouti à la division: les électeurs de Mayotte ont massivement choisi en 1974 (64%) et 1976 (99%) de rester sous l’autorité de la France, tandis que les autres îles votaient en faveur de l’indépendance. Mayotte devenait ainsi une collectivité territoriale de la République française. Depuis, l’État des Comores ne cesse de demander l’intégration de Mayotte et a même obtenu en ce sens une résolution des Nations unies, restée inappliquée. Une nouvelle consultation, modifiant le statut de Mayotte au sein de l’Outre-mer français, a été approuvée en 2000, avec une majorité de 73% des votants. Le statut de l’île est donc celui de la Constitution française, aménagée par une loi de 2001 qui la définit comme «collectivité départementale», ni département ni territoire. Le référendum du 29 mars 2009 décide de son passage au statut départemental, qui doit être effectif en 2011, l’alignement fiscal sur les autres départements devant intervenir d’ici 2014. Pour le moment, Mayotte est divisée en 17 communes, dont la plupart regroupent plusieurs villages qui sont des sous-unités de gestion et de recensement - on compte environ 70 villages en tout. La collectivité comporte également 19 cantons (un par commune et trois pour Mamoudzou), dont les élus forment le Conseil général; celui-ci a été élu en 2004 et renouvelé pour partie en 2008, à la suite de quoi il s’est donné pour président Ahmed Attoumani Dovchina, élu du canton de Kani-Kéli, UMP, qui a obtenu les votes des élus UMP et MDM (Mouvement départementaliste Mahorais). L’autorité de l’État est représentée par un préfet; un vice-recteur a été placé sous la tutelle du recteur de l’Académie de la Réunion. Mayotte est représentée au Parlement français par un député, Abdoulatifou Aly, du MDM, qui siège au titre du Modem et qui est avocat, ancien secrétaire du Conseil général de Mayotte et toujours adjoint au maire de Pamandzi; et par deux sénateurs, Adrien Giraud (Union centriste), directeur de société hôtelière, et Soibahaddine Ibrahim Ramadani (UMP), chargé de mission auprès du vice-recteur, également conseiller municipal de Chiconi et président du Syndicat mixte intercommunal de l’aménagement de Mayotte. La collectivité territoriale a aussi un Comité économique et social de 32 membres (président Abdou Dahalani, directeur du Syndicat mixte d’aménagement et d’investissement de Mayotte), et un représentant au Conseil économique et social à Paris (Anziza Moustoifa, conseillère technique au Travail social, également conseillère municipale de Pamandzi). La population de Mayotte reste dans la dualité par rapport à la loi: pour les affaires quotidiennes, elle peut opter pour la loi coranique, administrée par les cadis, ou pour la loi de la République, appliquée par des tribunaux normaux. La première suit la charia et autorise la polygamie; le statut de 2001, toutefois, lui apporte des limites, notamment vers l’égalité des sexes et la réduction du pouvoir des cadis, devenus assesseurs ou médiateurs. De nombreuses ordonnances avaient déjà permis, entre 1989 et 1998, de faire évoluer les textes et les pratiques en direction des règles métropolitaines. La départementalisation devrait harmoniser la loi avec celle de la République: interdiction de la polygamie pour les nouveaux mariages, une seule justice (mais qui devra tenir compte des coutumes…). La situation actuelle est donc celle d’un territoire de transition, qui fait figure de région privilégiée dans son environnement. Avec un produit brut évalué rétrospectivement à 610 millions d’euros pour 2001, le produit par habitant (un peu moins de 4 000 euros) y est neuf fois supérieur à celui des autres Comores, mais trois fois inférieur à celui de la Réunion, six fois à celui de la métropole. Cela entraîne un puissant appel de Comorais vers Mayotte - et de Mahorais vers la Réunion. Mayotte avait 42 000 habitants en 1975; sa population est passée à 131 400 hab. au recensement de 1997, 160 300 à celui de 2002, 186 400 en 2007. Le cap des 200 000 est proche, mais la statistique officielle est insuffisante. La forte natalité (4,2% par an) est pour beaucoup dans la croissance (le solde naturel est de 3,1% par an), et la population mahoraise est très jeune, ce qui pose d’énormes problèmes d’équipement scolaire; mais le solde migratoire est considéré comme encore supérieur (5,6% par an) en raison des nombreuses entrées en provenance des autres îles des Comores, surtout Anjouan. On estime que plus de la moitié de la population de Mayotte est «étrangère» et clandestine; les Anjouanais viennent nombreux sur des embarcations de fortune, non sans victimes, et s’entassent dans des logements précaires: les bidonvilles ont fleuri dans l’île. Les reconduites «à la frontière» sont massives à partir du centre de rétention de Pamandzi, d’ailleurs très critiqué, mais elles sont forcément partielles. Il en résulte une situation sociale tendue, un taux élevé de chômage (25%), un habitat souvent médiocre en dépit de la diffusion des «cases Sim» colorées, en accession à la propriété, mises au point et diffusées par la Société immobilière de Mayotte (société d’État). S’y ajoutent les difficiles problèmes d’alphabétisation, le fonds linguistique étant swahili et malgache et l’apprentissage du français difficile, quoique en voie de généralisation. La place de l’enseignement est éminente, tant en raison des besoins linguistiques que des effectifs qu’il mobilise: le vice-recteur est de loin le plus grand «employeur» de l’île, et l’enseignement le principal poste de dépense du budget public. Mayotte est dotée de 200 écoles recevant 40 000 élèves, 18 000 jeunes gens fréquentant les 16 collèges et les 8 lycées. Certains lycées préparent à des BTS mais Mayotte n’a pas d’enseignement supérieur; il existe toutefois un Centre des études et formations supérieures de Mayotte (Cefsm), dépendant du Conseil général, qui assure certains enseignements sous la tutelle de l’Université de la Réunion, un Institut de formation des maîtres (à Dembéni) et une antenne du Centre national de la fonction publique territoriale (Cnfpt). Des projets pour une Université de Mayotte ou du moins un pôle universitaire s’esquissent à l’horizon 2011; le Conseil général soutient déjà des bourses et des thèses, des liens ont été tissés avec plusieurs universités métropolitaines en plus de ceux qui ont été établis avec celle de la Réunion. L’économie locale reste fragile: 41% du produit brut viennent de l’administration, 30% des petits travaux des ménages et des entreprises individuelles, seulement 27% des entreprises à salariés. Plus de la moitié des ménages, 16 000, sont qualifiés d’agricoles mais n’exploitent guère que 20 000 ha; l’agriculture est presque exclusivement vivrière, les trois quarts des terres réellement cultivées étant consacrés au manioc (1 400 ha) et à la banane (4 600 ha), le reste aux prairies (17 000 bovins, 23 000 caprins). La colonie fut sucrière au milieu du 19e siècle, mais a depuis longtemps cessé de l’être. La consommation de riz est générale, sa culture anecdotique (40 ha); on cultive un peu de vanille (130 ha) et d’ylang-ylang (460 ha), introduit par Pierre Poivre au 19e siècle, mais les exportations sont en déclin (16 t d’ylang-ylang en 1999, 6 t en 2007). La pêche, essentiellement vivrière aussi et pratiquée par 4 800 personnes, en partie organisées par la Copemay (Coopérative des pêcheurs de Mayotte) et dont les prises sont évaluées à 2 000 tonnes par an, serait passée en tête aux exportations. Il est vrai que celles-ci sont très faibles: on les estime à peine à 5 millions d’euros par an, au total, pour 270 millions aux importations, qui portent en grande partie sur les produits pétroliers. Mayotte est désormais desservie par trois centrales électriques thermiques, les deux dernières de 40 MW, la consommation ayant été de 174 GWh en 2006 et augmentant régulièrement. L’électricité est produite par Électricité de Mayotte (EDM), société mixte associant la collectivité départementale, EdF et la Saur. La branche du bâtiment et des travaux publics est la plus fournie, occupant plus du tiers des salariés, mais le commerce progresse (22% des salariés contre 20% aux services et 13% à l’industrie) et l’île a reçu sa collection de supermarchés et même d’hypermarchés. Les plus grandes entreprises sont d’ailleurs dans la grande distribution (Bourbon et Sodifram), et dans la distribution d’électricité (EDM), d’eau (Sogea) et de carburants (Total), ainsi que les travaux publics (notamment le groupe Colas). Le tourisme reste discret (39 000 personnes en 2005, voyages d’affaires confondus). Le territoire de Mayotte est accidenté et la circulation y est difficile. Il est très boisé et compte un certain nombre d’espèces originales, que s’efforcent de protéger tout un ensemble de réserves forestières sur les hauts (5 600 ha), et plusieurs réserves marines visant notamment à préserver les tortues et les dugongs (mammifères marins proches des lamantins). L’île est relativement abritée des alizés, mais soumise à une mousson de sens nord-sud. Les températures moyennes varient entre 22 et 31 °C, la moyenne générale étant vers 25,6 °C. La forêt couvre environ 50% de la surface: 18 000 ha, mais à moitié en forêt sèche ou dégradée; il reste 500 ha de mangrove sur les rivages de la Grande Terre, notamment dans la baie de Bouéni. L’occupation du territoire est dissymétrique: à partir de la capitale Dzaoudzi, à vrai dire un petit village sur son îlot maintenant rattaché à la Petite-Terre par la chaussée dite boulevard des Crabes, se sont développés sur cette Petite-Terre un ensemble d’activités et de logements dans les agglomérations de Labattoir et de Pamandzi, ainsi que l’aéroport de Mayotte. Juste en face sur la Grande-Terre, l’agglomération de Mamoudzou concentre l’essentiel des emplois. Petite-Terre et Mamoudzou sont reliées par un défilé incessant de «barges» à travers le détroit. Les autres bourgades et les villages s’échelonnent le long de la côte de la Grande Terre. Mais le port maritime a été établi à Logoni sur la côte nord, face à la plus profonde passe du récif barrière, et la population augmente vivement le long de la côte entre Mamoudzou et Logoni, par Koungou. La Grande-Terre est cloisonnée par des crêtes, dont la principale est dans le sens de la longueur, nord-sud; la côte orientale, la plus fréquentée depuis Mamoudzou, a reçu les principaux équipements touristiques. La côte occidentale, moins accessible, conserve un visage plus traditionnel, ce qui d’ailleurs lui vaut une autre forme de tourisme, mais de visite et de menus achats plus que de séjour, comme à Sada qui en est la ville principale. Très peu de villages sont établis à l’intérieur, sauf quelques-uns dans la partie centrale. L’aéroport voit passer 200 000 passagers par an, et n’est accessible de France qu’à partir de la Réunion; sa piste est un peu courte (1 930 m) et son allongement à 2 600 m, qui devrait permettre les vols directs Mayotte-Paris, n’est pas prévu avant 2011. Le port de Longoni, aménagé depuis 1993, a un trafic total de 350 000 t, dont 6/7 aux entrées, la plupart en conteneurs; un terminal pour pétrole et gaz a été équipé en 2008, permettant en 2009 le démarrage d’une nouvelle centrale thermique; un nouveau terminal pour conteneurs est en travaux. |