Réunion (la)

département et région en France d’outre-mer, au sud-ouest de l’Océan Indien. La Réunion est une grande île volcanique de 2 512 km2, soit moitié moins qu’un département français moyen. Elle est située par 21° de latitude Sud et 55°30 de longitude Est, à 700 km à l’est de Madagascar et 200 km OSO de Maurice; cela la met à 9 200 km de la métropole, soit en général onze heures de vol, avec un décalage horaire de + 3 heures. Comme département, elle est divisée en 4 arrondissements, avec pour préfecture Saint-Denis et sous-préfectures Saint-Benoît, Saint-Paul et Saint-Pierre. Elle compte 24 communes, regroupées en 5 communautés d’agglomération. Les conseillers du département sont élus dans 25 nouveaux cantons, la plupart formés par des fractions de communes seules ou associées, afin de respecter autant que possible la règle d’égalité des populations. Seule La Possession coïncide avec son nouveau canton.

Les arrondissements ont été modifiés en 2006: La Possession et Le Port ont quitté celui de Saint-Denis et sont rattachées à Saint-Paul, tandis que Les Avirons et L’Étang-Salé sont détachées de Saint-Paul et associées à Saint-Pierre. Mais l’essentiel demeure, à savoir une quadripartition fréquente de l’île entre deux régions «du vent» (Nord et Est) et deux régions «sous le vent» (Ouest et Sud).

Sous ces latitudes, l’opposition entre les deux côtes est essentielle pour une île montagneuse: l’alizé du nord-est frappe le relief au vent, les pentes, qui regardent vers le nord-est étant ainsi très arrosées: elles reçoivent jusqu’à 8 et 10 mètres d’eau par an sur les hauts — on enregistre une moyenne de plus de 4 m à La Plaine-des-Palmistes, 3,3 m sur le littoral à Saint-Benoît. Les parties les plus arrosées sont le Volcan, à l’est, et les hauteurs de Bébour-Takamaka, au nord-est. Au contraire, la côte au sud-ouest est à l’abri, nettement plus sèche, et même parfois encore réchauffée par l’effet de foehn des vents freinés en descendant des crêtes; Le Port ne reçoit pas 0,5 m d’eau par an. Des travaux de grande ampleur ont été réalisés au profit de périmètres d’irrigation des basses pentes et des plaines sur la côte sud et les pentes dominant Saint-Paul à l’ouest, en transférant par canaux et souterrains des eaux du versant pluvieux (Salazie) vers l’ouest moins arrosé.

La Réunion est une île haute, culminant à 3 070 m au Piton des Neiges, au nom significatif. Ses pentes sont très vigoureuses et ravinées par des torrents profondément encaissés, au point que leurs versants raides sont çà et là dénommés «remparts». Elle le doit au volcanisme: elle juxtapose deux massifs distincts, posés sur une crête océanique et hauts de 7 200 m, dont un peu plus de 3 000 m sont émergés. Celui de l’ouest est plus ancien, et apaisé: le volcanisme ne s’y manifeste plus que par des émanations d’eaux chaudes soufrées. Il est profondément défoncé par les quatre cratères de Cilaos au sud, Mafate à l’ouest, Salazie au nord, Bébour au nord-est, de part et d’autre de l’étroite et haute crête du Piton des Neiges et du Gros Morne.

Les trois premiers ont conservé une forme en cirque, mais le quatrième a été comblé par des laves au point de ne plus apparaître comme cratère. Chacun est drainé par une rivière en gorge, Cilaos vers le sud par le Bras de Cilaos, Mafate vers l’ouest par la rivière des Galets, Salazie et Bébour vers le nord-est par la rivière du Mât et la rivière des Marsouins. Le plateau de Bébour est désert mais visité. Les trois cirques sont restés longtemps mal accessibles, et pour cette raison ont été peuplés de marrons, c’est-à-dire d’esclaves en fuite qui y cherchaient refuge et se sont établis dans de petits hameaux abrités, les îlets; Mafate est d’ailleurs encore dépourvu de route d’accès.

Le second massif volcanique, à l’est, est actif; la Fournaise, au nom significatif, crache régulièrement des laves, qui descendent en coulées vers la côte orientale, coupant assez souvent la route du tour de l’île (v. Volcan). Hors des cirques et du massif de laves du Volcan, le relief associe de profondes vallées, parfois en gorge, de grands versants en pente assez accusée comme à l’ouest des cirques de Mafate et Cilaos et, surtout à l’intérieur entre les deux grands massifs, des éléments de planèzes, plateaux de laves moins inclinés dénommés ici «plaines», même en altitude (plaine des Cafres, plaine des Palmistes).

La végétation est abondante comme dans toute île tropicale accidentée et arrosée. Elle est à la fois étagée et dissymétrique: les forêts sont sur les hauts, plus abondantes et touffues sur le versant du Vent, où elles descendent nettement plus bas; les versants sous le vent sont plus souvent en savanes et broussailles. La Réunion présente un large éventail d’espèces, dont de nombreuses lui sont propres. Depuis 2007, un Parc national en protège l’essentiel; v. Réunion (parc national de la). En outre, la Réunion protège plusieurs réserves naturelles nationales (la Roche Écrite, la Mare Longue, l’étang Saint-Paul) ou régionales (l’étang Bois-Rouge), et une réserve nationale marine (v. Réserve nationale marine de la Réunion) qui vise à protéger les formations coralliennes de la côte occidentale.

Les cultures ont des étagements et des dissymétries du même ordre: la côte du Vent a reçu les principales plantations de canne et, plus haut, les bananiers, tandis que les versants occidentaux et méridionaux ont plus volontiers des plantes aromatiques (géranium, vétiver, etc.). Toutefois, la pénétration agricole coloniale, développée à partir de Saint-Denis et par conséquent de préférence sur la côte à l’est de la capitale, fut un facteur non moins décisif de la dissymétrie entre le nord des grands planteurs, et le sud, où la culture de la canne à sucre s’est répandue plus tard.

Les côtes rocheuses dominent, et prennent parfois la forme de falaises, surtout au nord-ouest et sur la côte orientale. Les principales rivières ont apporté leurs épandages de galets, parfois assez étendus pour recevoir de vastes implantations industrielles et portuaires, comme aux débouchés de la rivière des Galets (Le Port et Saint-Paul) et de la rivière Saint-Étienne à Pierrefonds (Saint-Pierre). Ailleurs les apports dessinent de petites plages, les unes de galets, d’autres de sables noirs volcaniques, ou, plus appréciées, de sables blancs d’origine corallienne; sur 207 km de côtes, on compte 25 km de plages de sable blanc, 14 de sable noir, et 25 de récifs coralliens. L’île est en effet entourée d’une couronne de coraux, mais submergée; elle est attirante pour la plongée sous-marine et les spots de surf, mais ne s’exprime que rarement sous la forme d’îlots.

Cette île, encore inhabitée, était connue des Arabes qui la nommaient l’île de l’Ouest (Dina Mogarbim). Le Portugais Mascarenhas donna en 1613 son nom au groupe des îles Mascareignes et nomma celle-ci Santa Apollonia, selon le saint du jour de la «découverte», un nom vite oublié. Un Hollandais la baptisa England Forest au passage, tout aussi fugitivement. Lors de la première prise de possession française, en 1638, elle était Mascarin. Deux autres prises de possession symboliques se succédèrent en 1642 et 1649, la troisième entraînant un nouveau nom de baptême, Bourbon en hommage à la famille royale. Deux petits groupes de rebelles y furent provisoirement déportés en 1646 et 1654; leurs récits incitèrent à engager un peuplement durable, mais en 1663 seulement, avec une trentaine de personnes sous la tutelle de la Compagnie des Indes: c’était la première fois que l’île accueillait un peuplement humain volontaire et permanent.

La population totale n’était encore que de 500 hab. vers 1700. Puis, à partir de 1718, la culture du café fut introduite avec succès et entraîna l’importation massive d’esclaves. En 1764, la faillite de la Compagnie fit passer l’île Bourbon dans le domaine royal; puis la culture de plantes à épices fut lancée dans l’île, notamment par Pierre Poivre (1719-1786) à partir de Maurice, alors île de France, et surtout sur les pentes du sud-est de l’île; le lycée de Saint-Joseph porte son nom. En 1768, on comptait dans l’île environ 26 000 «libres» et 45 000 esclaves. En 1794 l’île fut nommée Réunion en hommage à la réunion des Marseillais et des Gardes nationaux le 10 août 1792 pour la prise des Tuileries; mais on refusa d’y appliquer l’abolition de l’esclavage pourtant décrétée par le gouvernement de la République et, de 1806 à 1810, on crut devoir nommer l’île Bonaparte.

En 1810, après quatre ans d’incursions, les Anglais s’en rendirent maîtres et lui rendirent son nom de Bourbon; les traités de 1814 rendirent l’île à la France, sous ce nom.

La première moitié du 19e siècle fut celle de l’importation massive d’esclaves pour la culture de la canne à sucre, tandis qu’un Conseil général commençait ses travaux d’administration en 1832. L’île Bourbon avait 103 000 habitants en 1848, et redevenait la Réunion avec la proclamation de la République. La deuxième abolition de l’esclavage put alors entrer en pratique, l’importation de main-d’œuvre se reportant vers des contrats d’«engagés» passés avec des immigrants recrutés à Madagascar, en Inde (Gujarat et côte des Malabars) et en Afrique de l’Est (Cafres). Le chemin de fer fut introduit en 1882, le port de la Pointe des Galets équipé en 1886; l’île avait 175 000 hab. en 1900, environ 240 000 vers 1940.

Le fond du peuplement de la Réunion est ainsi fourni par les descendants d’esclaves et de Cafres; les Réunionnais d’origine locale se disent créoles; les familles originaires de l’Inde formèrent la base de la population musulmane dite localement zarab, tandis que les Européens sont généralement nommés zoreil; Tamouls de la côte du Malabar et Chinois forment des minorités actives, qui ont leurs temples — tamoul désignant en général les Indiens non musulmans.

Pour l’essentiel, le peuplement de l’île reste périphérique. Ses points forts sont les quatre chefs-lieux d’arrondissement, eux-mêmes très inégaux. Saint-Denis est la capitale. Contrairement à la plupart des chefs-lieux des îles tropicales, elle n’est pas franchement du côté sous le vent: c’est Saint-Paul, la deuxième agglomération, qui a tenu un temps ce rôle historique, et qui d’ailleurs est encore «le» port de l’île, par son satellite du Port précisément. Il se trouve qu’un gouverneur a préféré transférer sa base de Saint-Paul à Saint-Denis, sur un site plus exposé aux vents mais qu’il jugeait plus facile à défendre contre les menaces, celles des Anglais en particulier, et surtout plus proche de l’île Maurice, alors île de France et le point fort des ambitions françaises dans l’Océan Indien: en somme, le chef-lieu de l’île Bourbon n’était qu’une projection et une dépendance de l’île de France, redevenue Maurice selon son nom hollandais originel.

Saint-Paul reste la deuxième agglomération. Saint-Pierre, chef-lieu du Sud, bénéficie de l’attractivité de la côte méridionale abritée, et tire parti de sa distance aux deux précédentes, qui appelait un solide relais. Saint-Benoît, au milieu de la côte du vent, n’a pas ces avantages; elle dessert un littoral qui fut le plus actif au temps des plantations et dont la population d’origine indienne est étoffée; il en reste quelque chose, mais la ville n’a ni le dynamisme ni le poids des trois autres.

Ces villes du littoral sont reliées par une route qui fait tout le tour de l’île, non sans mal et avec des dissymétries significatives: la nationale 1 a relié Saint-Denis à Saint-Paul puis Saint-Pierre, la nationale 2 faisant l’autre moitié du tour. Les trois principales villes furent reliées à Saint-Denis et au Port par une voie ferrée métrique également littorale, à présent abandonnée au profit de voies routières rapides qui reproduisent les hiérarchies: voie rapide achevée entre Saint-Denis et Saint-Paul, puis de Saint-Paul à Saint-Pierre qui a repris le nom de 1, l’ancienne N1 au bord du littoral devenant N1; route N2 améliorée de Saint-Denis à Saint-Benoît.

La configuration de la Réunion en deux massifs a permis en outre l’établissement d’une liaison transversale, la seule de l’île, entre Saint-Benoît et Saint-Pierre, c’est-à-dire les centres de la côte des alizés et de la côte sous le vent, sous le nom de N3. Elle court-circuite la partie la plus orientale du tour de l’île, où la route est d’ailleurs souvent menacée par les coulées de laves du Volcan. Elle a facilité l’établissement de l’habitat sur les hauteurs aux températures plus clémentes, appréciées des colons, en particulier à La Plaine-des-Palmistes et dans la commune du Tampon, où l’ancien nom des villages était le numéro des kilomètres comptés à partir de Saint-Pierre. Le Tampon et La Plaine-des-Palmistes sont ainsi les deux seules communes non littorales à être sur une grande route, et sont en forte croissance.

Les trois autres communes non littorales sont Cilaos, Salazie et Entre-Deux, accessibles par de petites routes en cul-de-sac, les deux premières dans leur cirque, la dernière sur les pentes entre les deux vallées du Bras de Cilaos et du Bras de la Plaine — le cirque de Mafate, inaccessible en voiture, est rattaché à La Possession et, pour une plus petite partie, à Saint-Paul, d’où une route très sinueuse monte au Maïdo (2 205 m) qui domine à l’ouest le cirque de Mafate avec un superbe panorama.

Ainsi s’esquisse une division de la Réunion en secteurs géographiques. Au nord brille la capitale, Saint-Denis, appuyée par ses voisines Sainte-Marie et Sainte-Suzanne: forte urbanisation, abondance de bureaux et d’agences, proximité de l’aéroport, valorisation et rénovation des héritages des plantations; mais le territoire est assez étroit, la forêt descend bas sur les pentes.

Plus à l’est, de Saint-André à Saint-Benoît, se déploie le domaine de la grande agriculture, sur un fond de peuplement dense, marqué par l’abondance des populations originaires du pourtour de l’Océan Indien et par la place de l’artisanat; les jeunes sont nombreux, mais partent volontiers, en raison de l’étroitesse des horizons d’emploi et de l’ampleur du chômage. Saint-André donne accès à Salazie, Saint-Benoît à la côte sud, ce qui est plus considérable. Entre les deux, Bras-Panon a moins de ressources et la forêt y tient une large place. Vers l’est, à Sainte-Rose, l’espace utilisé se réduit à une étroite bande au-dessus d’un littoral escarpé; la forêt domine et va même jusqu’à la côte; l’habitat s’efface peu à peu à cause de l’éloignement et des menaces du Volcan; certes la route du tour de l’île continue vers le sud, mais parfois coupée, et peu fréquentée.

À l’opposé, sortant de Saint-Denis vers l’ouest, il faut d’abord franchir une rupture, la Montagne, un relief difficile parcouru en hauteur par une route tortueuse, et qui menace en permanence de ses éboulements et ruissellements la route littorale qu’il domine brutalement.

On arrive alors dans l’agglomération de Saint-Paul, par La Possession et Le Port; elle unit dans le deuxième foyer urbain du pays le port maritime de l’île, des industries, des marchés, et un ensemble de stations balnéaires: Boucan Canot, Saint-Gilles-les-Bains, l’Ermitage, toutes trois dans la commune de Saint-Paul mais au-delà du centre-ville. L’habitat s’est densifié un peu plus haut, autour de Saint-Gilles-les-Hauts et de la Saline; plus haut encore, la D3 marque la limite entre cultures et savanes qui montent en direction du Maïdo; la forêt n’occupe tout en haut qu’une bande étroite, dominant le cirque de Mafate. Cet Ouest en général connaît une forte croissance et a une forte natalité; il parvient à combiner quartiers industriels et stations touristiques, bien séparés dans l’espace il est vrai, tandis que l’agriculture se concentre sur quelques points où elle bénéficie de nouvelles irrigations. L’habitat précaire n’y est pas rare, et contraste avec les villas cossues et les hôtels de tourisme.

Vers le sud, Les Trois-Bassins, Saint-Leu et Les Avirons ou même L’Étang-Salé sont un peu éloignées des grands centres; l’habitat s’y morcelle en nombreux hameaux le long des quatre routes étagées: la littorale N1 dédoublée, la D13, la D3 ou route Hubert Delisle. Le peuplement est moins dense, les hautes pentes portent savanes et broussailles sous le Grand Bénaré (2 898 m) et la forêt domaniale des Makes. Les lieux sont visités, mais un peu comme une agréable périphérie des villes principales.

Plus à l’est et au sud, Saint-Pierre, Le Tampon et Saint-Louis dessinent un triangle fort urbanisé, largement ouvert sur la côte sud mais qui a aussi un accès direct à la côte septentrionale par la N3, et qui abonde en plantations. Les paysages sont dégagés, l’ensoleillement est plus constant qu’au nord; l’université y a ses antennes, le second aéroport de l’île y est devenu international. C’est le troisième foyer urbain de la Réunion. Dans l’ensemble, sa population est moins féconde et moins jeune qu’au nord et à l’ouest, et l’habitat est de plus en plus résidentiel. Les revenus y sont plus faibles que dans la moyenne de l’île, l’agriculture familiale a plus de place, les maisons individuelles sont plus nombreuses.

Ce pays se prolonge à l’est par trois communes plus menues, un bout du monde pittoresque, creusé de profondes ravines, appartenant aux abords de la Fournaise; Petite-Île, Saint-Joseph et la déjà lointaine Saint-Philippe cultivent leurs spécialités, vétiver, géraniums et vacoas entre autres.

Reste l’intérieur, lui-même divisé: trois cirques d’un côté, jadis refuges extrêmes, aujourd’hui buts d’excursions privilégiés; à l’est le désert du Volcan, attraction incontournable mais toujours un peu inquiétant; entre les deux, les hautes plaines des Cafres et des Palmistes, aux températures clémentes et qui font figure de stations d’estivage de plus en plus habitées et cultivées. Le Parc national, créé en 2007, couvre sur les Hauts près de la moitié de la surface de l’île.

La Réunion a un double statut: département depuis 1946, elle est aussi une région depuis 1983 et l’application des lois Defferre. Depuis 1997, la Réunion figure parmi les «régions ultrapériphériques» (RUP) de l’Union européenne, ce qui lui vaut des subsides particuliers. La Réunion doit en effet faire face à des problèmes difficiles d’emploi et de croissance de la population: elle est passée de 241 700 hab. en 1946 à 476 700 en 1974 et 706 300 en 1999; la population totale officielle de 2023 atteint 872 600 hab. (863 100 pour la population dite municipale). Cela représente la densité considérable de 344 hab./km2, l’une des plus fortes des départements français, alors même que la moitié de l’île, dans les Hauts, est montagneuse et forestière. Le gain annuel est toutefois en baisse: +1,9% par an de 1970 à 1999; +0,4% depuis 2014 dont +1,1% par excédent de naissances (taux de natalité 1,6%, de mortalité 0,55%), mais -0,7% par excédent des sorties. Les jeunes sont très nombreux (28% des habitants ont moins de 20 ans), alors que les plus de 65 ans ne sont que 13% de la population mais la situation évolue, et la taille moyenne des ménages est passée de 4,5 personnes en 1974 à 2,5 en 2020.

Dans les emplois, les agriculteurs ne comptent que pour 2% (5 500), les employés pour 34%, les professions intermédiaires pour 26%, les ouvriers 19%, les cadres et professions intermédiaires 12%, les commerçants et artisans 8%. Administration, enseignement et services sociaux représentent 44% des emplois, commerce, transports et services privés 39%, construction et industrie 7% chacun, l’agriculture 3%. Le chômage officiel est évalué à 32% de la population dite active (123 000 personnes de 15 à 64 ans), mais certaines municipalités l’estiment très au-delà; c’est de toutes façons le taux le plus élevé de tous les départements d’outre-mer.

L’île a une université (16 000 étudiants). La Réunion a attiré de nombreux organismes de recherche. Le CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) y a 200 agents en huit sites. L’IRD (Institut de recherche pour le développement), le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), l’IFREMER (Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer), l’INSERM (recherche médicale) et le CNRS sont également présents. L’île bénéficie de plusieurs instituts spécialisés: l’OVPF (Observatoire volcanique du Piton de la Fournaise), l’ARVAM (Agence pour la recherche et la valorisation marines), le CERF (Centre d’essais, recherche et formation) qui s’occupe de la production de sucre, le CBNM (Conservatoire botanique national de Mascarin).

La Réunion compte environ 135 000 ha de forêts, landes et friches, soit plus de la moitié de la surface totale, dont 85 000 de bois, alors que l’agriculture n’occupe que 48 000 ha (moins de 20%). La canne à sucre y est encore la première culture: 25 600 ha, plus de la moitié de la surface utilisée, pour environ 2 Mt/an; l’herbe occupe 10 000 ha, les cultures légumières 1 300 ha, les vergers 2 200 ha, les jardins familiaux 4 000 ha.

Des efforts sont faits en vue de l’exportation, notamment pour la vanille, l’ananas victoria, le litchi (on écrit plutôt letchi à la Réunion), mais ces produits, localement intéressants et rémunérateurs, ne pèsent pas encore très lourd dans la balance commerciale. Guère plus de 500 ha sont consacrés aux bananeraies, 730 aux plantes aromatiques et à parfums, 420 aux agrumes. La pêche apporte 8 100 t, dont 1 000 pour la pêche côtière (330 pêcheurs et 250 bateaux), 2 300 pour la palangrière (pleine mer, 220 pêcheurs sur 34 navires) et 4 800 t pour la grande pêche dans les Territoires austraux et antarctiques, de loin la plus rémunératrice (170 pêcheurs).

Le commerce extérieur (la métropole comptant comme extérieur) est très déficitaire, les entrées étant quatorze fois supérieures aux sorties en valeur. Aux entrées, le premier poste est l’ensemble des produits chimiques et énergétiques, devant les produits alimentaires et les automobiles puis les machines et équipements. Le sucre reste de loin le premier produit exporté suivi à distance par les produits de la pêche, les boissons. Les échanges avec la métropole entrent pour 56% dans les entrées, 66% dans les sorties; Singapour est le second fournisseur de la Réunion (pétroles surtout), suivi de loin par l’Allemagne, les États-Unis et la Chine, alors que le Japon et Mayotte sont les meilleurs clients non métropolitains.

Les importations énergétiques sont d’environ 1,2 Mt d’équivalent pétrole (tep), dont 60% en hydrocarbures et 40% en charbons pour les centrales thermiques. La consommation totale de carburant est de 600 000 t par an, plus 130 000 pour les centrales électriques. La production locale d’électricité équivaut à 200 000 tep, dont deux tiers en thermique à fioul ou charbon, 44 000 en hydroélectricité (Takamaka et de petites centrales), 22 000 en bagasse. La Réunion importe donc l’essentiel de son énergie.

Les énergies renouvelables sont en progrès, mais encore très minoritaires. La production hydroélectrique est faible, l’éolien en est à ses balbutiements et la géothermie, curieusement, est peu envisagée bien qu’un programme ait été esquissé. Une première centrale photovoltaïque a été inaugurée en décembre 2006, sur les toits de la Saprim à Saint-Denis, la centrale d’achats des magasins de détail Jumbo et Score (groupe Casino par Vindimia), sous la forme de 10 000 m2 de panneaux censés produire 1,3 GWh/an avec une puissance d’un million de watts. La SIIF, filiale d’EDF Énergies nouvelles, a installé à Sainte-Rose en 2009 une deuxième centrale solaire, bien plus puissante (15 MW), faite de 100 000 panneaux, et qui porte bien plus loin le record de France. Vers 2022, la part de l’hydroélectricité dans la production électrique est de 14%, celle de l’éolien et du solaire de 9% comme celle de la bagasse — contre 38% au charbon, 30% au fioul.

La Réunion accueille chaque saison environ 430 000 touristes; ils concernent majoritairement les échanges avec la métropole, et se répartissent entre 42% d’«affinitaires» (voyages de Réunionnais et de leurs familles), 36% de touristes métropolitains, 12% de voyages d’affaires et 10% de touristes étrangers. Sur environ 800 000 passagers aériens à l’arrivée, 480 000 viennent de France métropolitaine, 220 000 de Maurice, environ 50 000 de Madagascar et autant de Mayotte, seulement 6 500 d’Afrique du Sud. Les arrivées l’emportent sensiblement sur les départs pour Madagascar et Mayotte; c’est l’inverse avec Maurice, ce qui tient en partie au sens de circulation des voyages touristiques combinant les deux îles en transit. Le port de voyageurs reçoit 40 000 passagers par an dont un quart en escale de croisière.

La Réunion est en net développement, avec un taux de croissance économique de 4 à 5% par an. Mais elle est soumise à des risques non négligeables: les uns liés aux éruptions de la Fournaise, d’autres aux violents cyclones tropicaux, ainsi qu’aux ruissellements, glissements et éboulements de terrains consécutifs aux forts abats d’eau de pluie, et qui dégradent fréquemment le réseau routier. En outre, elle a dû affronter à partir du début 2005, surtout en 2006, une pénible épidémie de chikungunya (chik en abrégé), qui provoque fièvres et fortes douleurs articulaires; elle est due à un virus transmis par des moustiques nichant près des habitations; un vaccin existe mais plusieurs années ont été nécessaires pour le développer et le généraliser.

Un excellent Atlas de la Réunion a été réalisé en 2003 par l’Université de la Réunion avec la coopération de l’Insee, sous la direction de J.-M. Jauze, G. Lajoie et al ISBN: 2-11-094605-9. À signaler aussi Villes et patrimoine à la Réunion, par Jean-Michel Jauze, à L’Harmattan, ISBN: 2-7384-9853-1; J.-L. Guébourg et H. Théry, «Une épure de la Réunion», Mappemonde https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M388/p12-13.pdf" target="_blank">n°3, 1988; J.-M. Jauze, «L’île de la Réunion: deux modèles de la dynamique spatiale des villes Mappemonde https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M296/Jauze.pdf" target="_blank">n°2, 1996; P. Bouchet et J.-C. Gay, «Les Hauts de la Réunion conquis par les loisirs», Mappemonde https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M398/Bouchet.pdf" target="_blank">n°3, 1998; E. Lagabrielle et al., «Les dynamiques d’occupation du sol à la Réunion (1989-2002)», Mappemonde https://mappemonde-archive.mgm.fr/num14/articles/art07205.html" target="_blank">n°86, 2007; M.G. Daalama, «L’île de la Réunion et le tourisme: d’une île de la désunion à la Réunion des Hauts et Bas», L’Espace géographique https://doi.org/10.3917/eg.344.0342" target="_blank">2005/4.

Retour