département et région en France d’outre-mer, au sud-ouest de l’Océan Indien. La Réunion est une grande île volcanique de 2 512 km2, soit moitié moins qu’un département français moyen. Elle est située dans l’hémisphère Sud, par 21° de latitude Sud et 55°30 de longitude Est, à 700 km à l’est de Madagascar et 200 km OSO de Maurice; cela la met à 9 200 km de la métropole, soit en général onze heures de vol, avec un décalage horaire de + 3 heures. Comme département, elle est divisée en 4 arrondissements, 49 cantons et 24 communes. Toutes les communes sont chef-lieu de canton à l’exception de Cilaos, rattachée au troisième canton de Saint-Louis; dix d’entre elles sont divisées en deux ou plusieurs cantons. Ces communes se rassemblent en quatre communautés d’agglomération (Cinor au nord, TCO à l’ouest, Cirest à l’est et Civis ou «Villes solidaires» au sud) et une communauté de communes (du Sud). La notion de communauté d’agglomération est ici un peu artificielle, sauf pour Saint-Denis, puisqu’il s’agit plutôt de groupements de grosses communes, mais non d’agglomérations à proprement parler. Saint-Philippe au sud-est, qui a quitté la Civis, est pour le moment la seule commune à ne pas faire partie d’une communauté. La Réunion est également divisée, à des fins d’étude, en quatre «microrégions» simplement dénommées Nord, Ouest, Sud et Est, qui correspondent désormais aux nouveaux arrondissements, et en partie aux intercommunalités. Les arrondissements ont en effet été modifiés en 2006: La Possession et Le Port ont quitté celui de Saint-Denis et sont rattachées à Saint-Paul, tandis que Les Avirons et L’Étang-Salé sont détachées de Saint-Paul et associées à Saint-Pierre. Mais l’essentiel demeure, à savoir une quadripartition fréquente de l’île entre deux régions «au vent» (Nord et Est) et deux régions «sous le vent» (Ouest et Sud). Sous ces latitudes, l’opposition entre les deux côtes est essentielle pour une île montagneuse: l’alizé du nord-est frappe le relief au vent, donc les pentes qui regardent vers le nord-est, et qui sont très arrosées: elles reçoivent jusqu’à 8 et 10 mètres d’eau par an sur les hauts — on enregistre une moyenne de plus de 4 m à La Plaine-des-Palmistes, 3,3 m sur le littoral à Saint-Benoît. Les parties les plus arrosées sont le Volcan, à l’est, et les hauteurs de Bébour-Takamaka, au nord-est. Au contraire, la côte au sud-ouest est à l’abri, nettement plus sèche, et même parfois encore réchauffée par l’effet de foehn des vents freinés et descendant des crêtes; Le Port ne reçoit pas 0,5 m d’eau par an. Des travaux de grande ampleur ont été réalisés au profit de périmètres d’irrigation des basses pentes et des plaines sur la côte sud et sont en cours pour irriguer les pentes dominant Saint-Paul à l’ouest, allant jusqu’à organiser un transfert des eaux du versant pluvieux (Salazie) vers l’ouest moins arrosé, par canaux et souterrains. La Réunion est une île haute, culminant à 3 070 m au Piton des Neiges, au nom significatif. Ses pentes sont très vigoureuses et ravinées par des torrents profondément encaissés, au point que leurs versants raides sont çà et là dénommés «remparts». Elle le doit au volcanisme: elle est formée par la juxtaposition de deux massifs distincts, posés sur une crête océanique et hauts de 7 200 m, dont un peu plus de 3 000 m sont émergés. Celui de l’ouest est plus ancien, et apaisé: le volcanisme ne s’y manifeste plus que par des émanations d’eaux chaudes soufrées. Il est profondément défoncé par les quatre cratères de Mafate à l’ouest, Salazie au nord, Cilaos au sud et Bébour au nord-est, de part et d’autre de l’étroite et haute crête du Piton des Neiges et du Gros Morne. Les trois premiers ont conservé une forme en cirque, mais le quatrième a été comblé par des laves au point de ne plus apparaître comme cratère. Chacun est drainé par une rivière en gorge, le premier vers l’ouest par la rivière des Galets, Salazie et Bébour vers le nord-est par la rivière du Mât et la rivière des Marsouins, Cilaos vers le sud par le Bras de Cilaos. Le plateau de Bébour est désert mais visité. Les trois cirques sont restés longtemps mal accessibles, et pour cette raison ont été peuplés de marrons, c’est-à-dire d’esclaves en fuite qui y cherchaient refuge et se sont établis dans de petits hameaux abrités, les îlets; Mafate est d’ailleurs encore dépourvu de route d’accès. Le second massif volcanique, à l’est, est actif; la Fournaise, au nom significatif, crache régulièrement des laves, qui descendent en coulées vers la côte orientale, coupant assez souvent la route du tour de l’île (v. Volcan). Hors des cirques et du massif de laves du Volcan, le relief associe de profondes vallées, parfois en gorge, de grands versants en pente assez accusée comme à l’ouest des cirques de Mafate et Cilaos et, surtout à l’intérieur entre les deux grands massifs, des éléments de planèzes, plateaux de laves moins inclinés dénommés ici «plaines», même en altitude (plaine des Cafres, plaine des Palmistes). La végétation est abondante comme dans toute île tropicale accidentée et arrosée. Elle est à la fois étagée et dissymétrique: les forêts sont sur les hauts, et plus abondantes et touffues sur le versant du Vent, où elles descendent nettement plus bas; les versants sous le vent sont plus souvent en savanes et broussailles. La Réunion présente un large éventail d’espèces, dont de nombreuses lui sont propres. Depuis 2007, un Parc national en protège l’essentiel; v. Réunion (parc national de la). En outre, la Réunion protège plusieurs réserves naturelles nationales (la Roche Écrite, la Mare Longue, l’étang Saint-Paul) ou régionales (l’étang Bois-Rouge), et une réserve nationale marine (v. Réserve nationale marine de la Réunion) qui vise à protéger les formations coralliennes de la côte occidentale. Les cultures ont des étagements et des dissymétries du même ordre: la côte au Vent a reçu les principales plantations de canne et, plus haut, les bananiers, tandis que les versants méridionaux ont plus volontiers des plantes aromatiques (géranium, vétiver, etc.). Toutefois, la pénétration agricole coloniale, développée à partir de Saint-Denis et par conséquent de préférence sur la côte à l’est de la capitale, fut un facteur non moins décisif de la dissymétrie entre le nord des grands planteurs, et le sud, où la culture de la canne à sucre s’est développée plus tard. Les côtes rocheuses dominent, et prennent parfois la forme de falaises, surtout au nord-ouest et sur la côte orientale. Les principales rivières ont apporté leurs épandages de galets, parfois assez étendus pour recevoir de vastes implantations industrielles et portuaires, comme aux débouchés de la rivière des Galets (Le Port et Saint-Paul) et de la rivière Saint-Étienne à Pierrefonds (Saint-Pierre). Ailleurs les apports dessinent de petites plages, les unes de galets, d’autres de sables noirs volcaniques, ou, plus appréciées, de sables blancs d’origine corallienne; sur 207 km de côtes, on compte 25 km de plages de sable blanc, 14 de sable noir, et 25 de récifs coralliens. L’île est en effet entourée d’une couronne de coraux, mais submergée; elle est attirante pour la plongée sous-marine et les spots de surf, mais ne s’exprime que rarement sous la forme d’îlots. Cette île, encore inhabitée, était connue des Arabes qui la nommaient l’île de l’Ouest (Dina Mogarbim); le Portugais Mascarenhas donna en 1613 son nom au groupe des îles Mascareignes et nomma celle-ci Santa Apollonia, selon le saint du jour de la «découverte», un nom vite oublié. Un Hollandais la baptisa England Forest au passage, tout aussi fugitivement. Lors de la première prise de possession française, en 1638, elle était Mascarin. Deux autres prises de possession symboliques se succédèrent en 1642 et 1649, la troisième entraînant un nouveau nom de baptême, Bourbon en hommage à la famille royale. Deux petits groupes de rebelles y furent provisoirement déportés en 1646 et 1654; leurs récits incitèrent a engager un peuplement durable, mais en 1663 seulement, avec une trentaine de personnes sous la tutelle de la Compagnie des Indes: c’était la première fois que l’île accueillait un peuplement humain volontaire et permanent. La population totale n’était encore que de 500 hab. vers 1700. Puis, à partir de 1718, la culture du café fut introduite avec succès et entraîna l’importation massive d’esclaves. En 1764, la faillite de la Compagnie fit passer l’île Bourbon dans le domaine royal; puis la culture de plantes à épices fut lancée dans l’île, notamment par Pierre Poivre (1719-1786) à partir de Maurice, alors île de France, et surtout sur les pentes du sud-est de l’île; le lycée de Saint-Joseph porte son nom. En 1768, on comptait dans l’île environ 26 000 «libres» et 45 000 esclaves. En 1794 l’île fut nommée Réunion en hommage à la réunion des Marseillais et des Gardes nationaux le 10 août 1792 pour la prise des Tuileries; mais on refusa d’y appliquer l’abolition de l’esclavage pourtant décrétée par le gouvernement de la République et, de 1806 à 1810, on crut devoir nommer l’île Bonaparte. En 1810, après quatre ans d’incursions, les Anglais s’en rendirent maîtres et lui rendirent son nom de Bourbon (sur les cartes anciennes de la Réunion, v. J.-L. Guébourg dans https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M291/REUNION.pdf). La première moitié du 19e siècle fut celle de l’importation massive d’esclaves pour la culture de la canne à sucre, tandis qu’un Conseil général commençait ses travaux d’administration en 1832. L’île Bourbon avait 103 000 habitants en 1848, et redevenait la Réunion avec la proclamation de la République. La deuxième abolition de l’esclavage put alors entrer en pratique, l’importation de main-d’œuvre se reportant vers des contrats d’«engagés» passés avec des immigrants recrutés à Madagascar, en Inde (Gujarat et côte des Malabars) et en Afrique de l’Est (Cafres). Le chemin de fer fut introduit en 1882, le port de la Pointe des Galets équipé en 1886; l’île avait 175 000 hab. en 1900, environ 240 000 vers 1940. Le fond du peuplement de la Réunion est ainsi fourni par les descendants d’esclaves et de Cafres; les Réunionnais d’origine locale se disent créoles; les familles originaires de l’Inde formèrent la base de la population musulmane dite localement zarab, tandis que les Européens sont généralement nommés zoreil; Tamouls de la côte du Malabar et Chinois forment des minorités actives, qui ont leurs temples — tamoul désignant en général les Indiens non musulmans. V. A. de Cauna sur les cimetières, https://mappemonde.mgm.fr/num5/articles/art05108.html Pour l’essentiel, le peuplement de l’île reste périphérique. Ses points forts sont les quatre chefs-lieux d’arrondissement, eux-mêmes très inégaux. Saint-Denis est la capitale. Contrairement à la plupart des îles chefs-lieux des îles tropicales, elle n’est pas franchement du côté sous le vent et tournée vers le colonisateur: c’est Saint-Paul, la deuxième agglomération, qui a tenu un temps ce rôle historique, et qui d’ailleurs est encore «le» port de l’île, par son satellite du Port précisément. Il se trouve simplement qu’un gouverneur a préféré transférer sa base à Saint-Denis, sur un site plus exposé aux vents mais qu’il jugeait plus facile à défendre contre les menaces, celles des Anglais en particulier, et surtout plus proche de l’île Maurice, alors le point fort des ambitions françaises dans l’Océan Indien: en somme, le chef-lieu de l’île Bourbon n’était qu’une projection et une dépendance de l’île de France, devenue depuis Maurice. Saint-Paul reste la deuxième agglomération. Saint-Pierre, chef-lieu du Sud, bénéficie de l’attractivité de la côte méridionale abritée, et tire parti de sa distance aux deux précédentes, qui appelait un solide relais. Saint-Benoît, au milieu de la côte du vent, n’a pas ces avantages; elle dessert un littoral qui fut le plus actif au temps des plantations et dont la population d’origine indienne est étoffée; il en reste quelque chose, mais la ville n’a ni le dynamisme ni le poids des trois autres. Ces villes du littoral sont reliées par une route qui fait tout le tour de l’île, non sans mal et avec des dissymétries significatives: la nationale 1 reliait Saint-Denis à Saint-Paul puis Saint-Pierre, la nationale 2 faisait l’autre moitié du tour. Les trois principales villes furent reliées à Saint-Denis et au Port par une voie ferrée métrique également littorale, à présent abandonnée au profit de voies routières rapides qui reproduisent les hiérarchies: autoroute achevée entre Saint-Denis et Saint-Paul, en cours de construction de Saint-Paul à Saint-Pierre sous le nom de route des Tamarins, route améliorée de Saint-Denis à Saint-Benoît. La configuration de la Réunion en deux massifs a permis en outre l’établissement d’une liaison transversale, la seule de l’île, entre Saint-Benoît et Saint-Pierre, c’est-à-dire les centres de la côte des alizés et celui de la côte sous le vent, sous le nom de nationale 3. Elle court-circuite la partie la plus orientale du tour de l’île, où la route est d’ailleurs souvent menacée par les coulées de laves. Elle a facilité l’établissement de l’habitat sur les hauteurs aux températures plus clémentes, appréciées des colons, en particulier à La Plaine-des-Palmistes et dans la commune du Tampon, où l’ancien nom des villages était le numéro des kilomètres comptés à partir de Saint-Pierre. Le Tampon et La Plaine-des-Palmistes sont ainsi les deux seules communes non littorales à être sur une grande route, et sont en forte croissance. Les trois autres communes non littorales sont Cilaos, Salazie et Entre-Deux, accessibles par de petites routes en cul-de-sac, les deux premières dans leur cirque, la dernière sur les pentes entre les deux vallées du Bras de Cilaos et du Bras de la Plaine — le cirque de Mafate, inaccessible en voiture, est rattaché à La Possession et, pour une plus petite partie, à Saint-Paul. V. notamment de J.-M. Jauze l’article sur les centralités de la Réunion, https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M398/Jauze.pdf, et celui de J. Ninon sur l’expansion urbaine et le grand commerce dans https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M300/Ninon.pdf. Ainsi s’esquisse une division de la Réunion en secteurs géographiques. Au nord brille la capitale, Saint-Denis, appuyée par ses voisines Sainte-Marie et Sainte-Suzanne: forte urbanisation, abondance de bureaux et d’agences, proximité de l’aéroport, valorisation et rénovation des héritages des plantations; mais le territoire est assez étroit, la forêt descend bas sur les pentes. Plus à l’est, de Saint-André à Saint-Benoît, se déploie le domaine de la grande agriculture, sur un fond de peuplement dense, marqué par l’abondance des populations originaires du pourtour de l’Océan Indien et par la place de l’artisanat; les jeunes sont nombreux, mais partent volontiers, en raison de l’étroitesse des horizons d’emploi et de l’ampleur du chômage. Saint-André donne accès à Salazie, Saint-Benoît à la côte sud, ce qui est plus considérable. Entre les deux, Bras-Panon a moins de ressources et la forêt y tient une large place. Vers l’est, à Sainte-Rose, l’espace utilisé se réduit à une étroite bande au-dessus d’un littoral escarpé; la forêt domine et va même jusqu’à la côte; l’habitat s’efface peu à peu à cause de l’éloignement et des menaces du Volcan; certes la route du tour de l’île continue vers le sud, mais parfois coupée, et peu fréquentée. À l’opposé, sortant de Saint-Denis vers l’ouest, il faut d’abord franchir une rupture, un relief difficile parcouru en hauteur par une route tortueuse, et qui menace en permanence de ses éboulements et ruissellements la route littorale qu’il domine brutalement. On arrive alors dans l’agglomération de Saint-Paul, par La Possession et Le Port; elle unit dans le deuxième foyer urbain du pays le port maritime de la région, des industries, des marchés, et un ensemble de stations balnéaires: Boucan Canot, Saint-Gilles-les-Bains, l’Ermitage, toutes trois dans la commune de Saint-Paul mais au-delà du centre-ville. L’habitat s’est densifié un peu plus haut, autour de Saint-Gilles-les-Hauts et de la Saline; plus haut encore, la D 3 marque la limite entre cultures et savanes qui montent en direction du Maïdo; la forêt n’occupe tout en haut qu’une bande étroite, dominant le cirque de Mafate. Cet Ouest en général connaît une forte croissance et a de nombreux enfants; il parvient à combiner quartiers industriels et stations touristiques, bien séparés dans l’espace il est vrai, tandis que l’agriculture se concentre sur quelques points où elle bénéficie de nouvelles irrigations. L’habitat précaire n’y est pas rare, et contraste avec les villas cossues et les hôtels de tourisme. Vers le sud, Les Trois-Bassins, Saint-Leu et Les Avirons ou même L’Étang-Salé sont un peu éloignés des grands centres; l’habitat s’y morcelle en nombreux hameaux le long des trois routes étagées: la littorale, la D 13, la D 3 ou route Hubert Delisle. Le peuplement est moins dense, les hautes pentes portent savanes et broussailles sous le Grand Bénaré. Les lieux sont visités, mais un peu comme une agréable périphérie des villes principales. Plus à l’est, Saint-Pierre, Le Tampon et Saint-Louis dessinent un triangle fort urbanisé, largement ouvert sur la côte sud mais qui a aussi un accès direct à la côte septentrionale, et qui abonde en plantations. Les paysages sont dégagés, l’ensoleillement est plus constant qu’au nord; l’université y a ses antennes, l’aéroport est devenu international. C’est le troisième foyer de l’île. Dans l’ensemble, sa population est moins féconde et moins jeune qu’au nord et à l’ouest, et il est de plus en plus résidentiel, recevant davantage de nouveaux habitants qu’il ne perd d’anciens. Les revenus y sont plus faibles que dans la moyenne de l’île, l’agriculture familiale a plus de place, les maisons individuelles sont plus nombreuses. Ce pays se prolonge à l’est par trois communes plus menues, un bout du monde pittoresque, creusé de profondes ravines et appartenant aux abords de la Fournaise; Petite-Île, Saint-Joseph et la déjà lointaine Saint-Philippe cultivent leurs spécialités, vétiver, géraniums et vacoas entre autres; Saint-Philippe pousse son isolement de finisterre jusqu’à être la seule à s’abstenir d’entrer dans une communauté de communes. Reste l’intérieur, lui-même divisé: trois cirques d’un côté, jadis refuges extrêmes, aujourd’hui buts d’excursions privilégiés; à l’est le désert du Volcan, attraction incontournable mais toujours un peu inquiétant; entre les deux, les hautes plaines des Cafres et des Palmistes, aux températures clémentes et qui font figure de stations d’estivage de plus en plus habitées et cultivées. Le Parc national, créé en 2007, couvre sur les Hauts près de la moitié de la surface de l’île. La Réunion a un double statut: département depuis 1946, elle est aussi une région depuis 1983 et l’application des lois Defferre. Elle a donc un conseil général de 49 membres, que préside Nassimah Dindar, une jeune femme (née en 1960) d’origine zarabe dont la famille, musulmane, est venue du Gujarat (Inde); élue du premier canton de Saint-Denis, elle est professeur de français et d’histoire, et appartient à l’UMP mais a été élue en acceptant des accords avec la gauche. Inversement, l’assemblée régionale a une majorité de gauche; elle est présidée depuis 1998 par Paul Vergès, ancien député et ancien sénateur, député européen, qui est d’une autre génération (né en 1925), grande figure réunionnaise qui fonda le Parti communiste réunionnais et fut maire du Port. Sur cinq députés, deux sont UMP (Didier Robert et René-Paul Victoria), deux socialistes (Patrick Lebreton et Jean-Claude Futeau); Huguette Bello, aussi maire de Saint-Paul, est du Parti communiste et présidente de l’Union des femmes réunionnaises. La Réunion a trois sénateurs: deux femmes, Gélita Hoareau (communiste) et Anne-Marie Payet (Union centriste); un homme, Jean-Paul virapoullé (UMP). La Réunion est représentée au Conseil économique et social par Younousse Omarjee, également trésorier de l’UMP de la région. Depuis 1997, la Réunion figure parmi les «régions ultrapériphériques» (RUP) de l’Union européenne, ce qui lui vaut des subsides particuliers. La Réunion doit en effet faire face à des problèmes difficiles d’emploi et de croissance de la population: elle est passée de 241 700 hab. en 1946 à 476 700 en 1974 et 706 300 en 1999; les estimations pour 2005 lui donnent 775 000 habitants, devenus 791 000 en 2006. Cela représente la densité considérable de 315 hab./km2, l’une des cinq plus fortes des départements français, alors même que la moitié de l’île, dans les Hauts, est montagneuse et forestière. Le gain annuel est de 1,35% par excédent de naissances (taux de natalité 1,8%, de mortalité 0,55%), 0,15% par excédent des entrées, notamment en provenance de Mayotte; aussi les jeunes sont-ils très nombreux (37% des habitants ont moins de 20 ans), alors que les plus de 60 ans ne sont que 11% de la population. Le chômage officiel est évalué à 24% de la population dite active, mais les municipalités l’estiment très au-delà; c’est de toute façon le taux le plus élevé de tous les départements d’outre-mer. Le produit brut annuel est évalué à 12,7 milliards d’euros (2006); par habitant, cela représente 16 200 euros, soit 55% de la métropole, mais Paris inclus; par emploi (51 600 euros), la différence est bien moins grande. La valeur ajoutée par l’éducation, la santé et l’administration atteint 37% de la valeur ajoutée totale, les services apportant 27%, le commerce et la finance 15%, l’industrie et l’énergie 7%, le bâtiment 6,8%, les transports 6,2% et l’agriculture seulement 1,6%. Les agents de l’État sont au nombre de 26 000, dont 20 000 dans l’éducation; ceux des collectivités locales sont 22 000, et les services hospitaliers emploient 6 400 personnes. Les étudiants sont 16 000, dont 11 500 à l’Université, 1 300 en IUFM (formation des maîtres), 2 700 en BTS et 500 dans les classes préparatoires aux grandes écoles. La Réunion a également attiré de nombreux organismes de recherche. Le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) y a 200 agents en huit sites. L’IRD (Institut de recherche pour le développement) a 35 chercheurs sur 4 sites. Le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), l’Ifremer (Institut Francais de Recherche pour l’Exploitation de la Mer), l’Inserm (recherche médicale) et le CNRS sont également présents. L’île bénéficie de plusieurs instituts spécialisés: l’OVPF (Observatoire volcanique du Piton de la Fournaise), l’Arvam (Agence pour la recherche et la valorisation marines), le Cerf (Centre d’essais, recherche et formation) qui s’occupe de la production de sucre, le CBNM (Conservatoire botanique national de Mascarin). L’industrie et l’artisanat occupent 14 000 personnes (un peu moins de 9 000 salariés) pour un chiffre d’affaires de 2 000 M€ et une valeur ajoutée de 720 M€. Si l’on considère les entreprises industrielles de plus de 10 salariés, l’agro-alimentaire est le premier poste avec 3 300 travailleurs et 180 M€ de valeur ajoutée; viandes et lait y occupent 1 100 personnes, le sucre et les boissons 1 300; la métallurgie-mécanique (2 100 salariés), l’imprimerie et la presse (1 100), les produits minéraux (1 100) viennent ensuite. Le commerce et les services financiers apportent 1 600 M€ de valeur ajoutée, les services marchands 2 800 M€, l’éducation et la santé 2 600 M€, l’administration publique 1 300 M€; la part du bâtiment est de 720 M€, celle des transports de 660 M€. Il reste moins de 2% de la valeur ajoutée pour l’agriculture (200 M€), dont le volume de production totale est de 360 M€, pour 7 000 exploitants, mais dont la plupart n’ont que de très petites exploitations (4 600 au-dessous de 5 ha). La Réunion compte environ 135 000 ha de forêts, landes et friches, soit plus de la moitié de la surface totale, dont 85 000 de bois, alors que l’agriculture n’occupe que 48 000 ha (moins de 20%). La canne à sucre y est encore la première culture: 25 600 ha, plus de la moitié de la surface utilisée, pour environ 2 Mt/an et 110 M€; l’herbe occupe 10 000 ha, les cultures légumières 1 300 ha, les vergers 2 200 ha, les jardins familiaux 4 000 ha. Les fruits sont le deuxième produit en valeur (80 M€), les légumes le troisième (47 M€) suivis par les viandes (42 M€) et les produits volaillers (46 M€). Les autres cultures n’interviennent que pour 17 M€, les produits laitiers pour 11 M€. Des efforts sont faits en vue de l’exportation, notamment pour la vanille, l’ananas victoria, le litchi (on écrit plutôt letchi à la Réunion), mais ces produits, localement intéressants et rémunérateurs, ne pèsent pas encore très lourd dans la balance commerciale. Guère plus de 500 ha sont consacrés aux bananeraies, 730 aux plantes aromatiques et à parfums, 420 aux agrumes. Les productions annuelles sont évaluées à 16 000 t d’ananas, 8 000 t de tomates, 8 000 t d’agrumes et 10 000 t de bananes, 7 300 de litchis et 3 600 de mangues, mais la plus grande partie est consommée sur place ou perdue. La vanille compte pour 20 à 25 t/an, le gingembre pour 95 t, l’essence de géranium pour 2 t. L’île aurait 35 000 bovins et obtient 250 000 hl de lait par an; elle a aussi 88 000 porcins, 19 000 caprins et seulement 1 000 ovins, mais plus de 2 millions de volailles, fournissant 110 millions d’œufs annuellement. La pêche apporte 8 100 t, dont 1 000 pour la pêche côtière (moins de 5 M€, 330 pêcheurs et 250 bateaux), 2 300 pour la palangrière (pleine mer, 9 M€, 220 pêcheurs sur 34 navires) et 4 800 t pour la grande pêche dans les Territoires austraux et antarctiques, de loin la plus rémunératrice (52 M€, 170 pêcheurs). Le commerce extérieur (la métropole comptant comme extérieur) est très déficitaire, les entrées (3 700 M€) étant quatorze fois supérieures aux sorties (260 M€). Aux entrées, le premier poste est l’ensemble des produits chimiques et énergétiques (840 M€) devant les produits alimentaires (550 M€) et automobiles (440 M€), puis les machines et équipements (350 M€). Le sucre reste de loin le premier produit exporté (130 M€), suivi à distance par les produits de la pêche (36 M€), les boissons (11 M€), les fruits n’apportant encore que 5 M€. Les échanges avec la métropole entrent pour 56% dans les entrées, 66% dans les sorties; Singapour est le second fournisseur de la Réunion (pétroles surtout), suivi de loin par l’Allemagne, les États-Unis et la Chine, alors que le Japon et Mayotte sont les meilleurs clients non métropolitains. Les importations énergétiques sont d’environ 1,2 Mt d’équivalent pétrole (tep), dont 60% en hydrocarbures et 40% en charbons pour les centrales thermiques. La consommation totale de carburant est de 600 000 t par an, plus 130 000 pour les centrales électriques. La production locale d’électricité équivaut à 200 000 tep, dont deux tiers en thermique à fioul ou charbon, 44 000 en hydroélectricité (Takamaka et de petites centrales), 22 000 en bagasse. La Réunion importe donc l’essentiel de son énergie; la production hydroélectrique est faible, l’éolien en est à ses balbutiements et la géothermie, curieusement, est peu envisagée bien qu’un programme ait été esquissé en 2001. Une centrale photovoltaïque a été inaugurée en décembre 2006, sur les toits de la Saprim à Saint-Denis, la centrale d’achats des magasins de détail Jumbo et Score (groupe Casino par Vindimia), sous la forme de 10 000 m2 de panneaux censés produire 1,3 GWh/an avec une puissance d’un million de watts. La SIIF, filiale d’EdF Énergies nouvelles, installe à Sainte-Rose en 2009 une deuxième centrale solaire, bien plus puissante (15 MW), faite de 100 000 panneaux, et qui porte bien plus loin le record de France. La Réunion accueille chaque saison environ 430 000 touristes, qui y dépensent un peu plus de 300 millions d’euros (plus une cinquantaine au titre de la part qui revient à la région dans les frais de voyage aérien); ils concernent majoritairement les échanges avec la métropole, et se répartissent entre 42% d’«affinitaires» (voyages de Réunionnais et de leurs familles), 36% de touristes métropolitains, 12% de voyages d’affaires et 10% de touristes étrangers. Le tourisme a régressé à partir de 2006, tombant de 1,2 million de nuitées dans les hôtels classés à 760 000 et le nombre d’arrivées passant de 440 000 à 350 000, les dépenses de 310 à 220 M€. la comparaison des nombres montre la brièveté des séjours, qui sont plus d’affaires que de loisirs, du moins dans les hôtels; mais l’accueil dans les familles ou chez les amis représente un volume équivalent, sur de plus longues durées. Sur environ 800 000 passagers aériens à l’arrivée, 480 000 viennent de France métropolitaine, 220 000 de Maurice, environ 50 000 de Madagascar et autant de Mayotte, seulement 6 500 d’Afrique du Sud. Les arrivées l’emportent sensiblement sur les départs pour Madagascar et Mayotte; c’est l’inverse avec Maurice, ce qui tient en partie au sens de circulation des voyages touristiques combinant les deux îles. Le port de commerce de l’île a un trafic annuel de 4 100 M€, dont 3,9 aux importations, et un fort trafic de conteneurs. Au même endroit, justement nommé Le Port, sont le port de voyageurs (40 000 passagers par an dont un quart en escale de croisière) et le port militaire, qui se targue d’être le 3e de France. L’île a équipé quatre ports de plaisance à la Pointe des Galets (Le Port), Saint-Gilles-les-Bains (à Saint-Paul), Saint-Pierre et Sainte-Marie, où sont enregistrés un peu plus de 1 300 bateaux. La Réunion est en net développement, avec un taux de croissance économique de 4 à 5% par an. Mais elle est soumise à des risques non négligeables: les uns liés aux éruptions de la Fournaise, d’autres aux violents cyclones tropicaux, ainsi qu’aux ruissellements, glissements et éboulements de terrains consécutifs aux forts abats d’eau de pluie, et qui dégradent fréquemment le réseau routier. En outre, elle a dû affronter à partir du début 2005, surtout en 2006, une pénible épidémie de chikungunya (chik en abrégé), qui provoque fièvres et fortes douleurs articulaires; elle est due à un virus transmis par des moustiques nichant près des habitations; un vaccin existe mais plusieurs années ont été nécessaires pour le développer et le généraliser. V. sur ce sujet A. Magnan, «L’épidémie de Chikungunya à La Réunion: un problème de santé publique (https://mappemonde.mgm.fr/actualites/chikung.html). Un excellent Atlas de la Réunion a été réalisé en 2003 par l’Université de la Réunion avec la coopération de l’Insee, sous la direction de J.-M. Jauze, G. Lajoie et al. À signaler aussi Villes et patrimoine à la Réunion, par Jean-Michel Jauze, à L’Harmattan; J.-L. Guébourg et H. Théry, «Une épure de la Réunion», Mappemonde 1988 (https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M388/p12-13.pdf); J.-M. Jauze, «L’île de la Réunion: deux modèles de la dynamique spatiale des villes. Mappemonde, 1996 (www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M296/Jauze.pdf); P. Bouchet et J.-C. Gay, «Les Hauts de la Réunion conquis par les loisirs». Mappemonde 51, 1998 (https://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M398/Bouchet.pdf); E. Lagabrielle et al., «Les dynamiques d’occupation du sol à la Réunion (1989-2002)», Mappemonde 86, 2007 (mappemonde.mgm.fr/num14/articles/art07205.html); nombreuses cartes intéressantes dans Gilles Lajoie et Alex Hagen-Zanker, «La simulation de l’étalement urbain à La Réunion: apport de l’automate cellulaire Metronamica® pour la prospective territoriale», Cybergéo n°405, 2008 (http://www.cybergeo.eu/index11882.html). Pour la situation de la Réunion dans l’Océan Indien, v. http://www.taglioni.net/atlas/ |