Cathare (pays)

dénomination récente et imprécise, à fonction publicitaire, devenue porteuse d’identité dans l’Aude et alentour, désignant le département de l’Aude, parfois davantage avec une partie de l’Ariège, tantôt seulement ce qui est au sud de Carcassonne. Elle figure même dans une appellation de vin de pays étendue à tout le département de l’Aude, sauf les cantons montagnards de Belcaire et d’Axat, et à de nombreuses communes de l’Ariège. On trouve aussi une exposition-spectacle Catharama (!) à Limoux et quantité de routes et sentiers «des châteaux cathare s» et mêmes des… catharactes. Le phénomène cathare originel y est complètement perdu de vue ou travesti, et pris dans un sens purement valorisant et marchand, tout à fait ignorant de l’histoire.

Cathares, Corbières et Carcassonne. La première moitié du treizième siècle a marqué la prise de pouvoir du roi de France en Languedoc, et accessoirement la victoire de l’ordre catholique dominant. La croisade décrétée contre les cathares, une secte que l’on dirait de nos jours intégriste dont les tenants se voulaient «purs» (d’où le nom grec) voire «parfaits» (ils se disaient tels) fut surtout un prétexte à la conquête de terres nouvelles par les Capétiens. Elle fut faite sans ménagement, en deux temps. En 1209, les troupes de Simon de Montfort, envoyé comme conquérant au nom du pape et du roi, ravagèrent le pays, avec une sauvagerie remarquée même à l’époque. Son fils Amaury (le prénom est encore de nos jours une injure en région toulousaine) dut affronter ensuite de nombreuses rébellions et céder la conquête directement au roi, dont les troupes réduisirent les dernières résistances en 1240, les fameux châteaux cathares des Corbières tombant les uns après les autres. Cathares, les seigneurs locaux ne l’étaient guère, et les châteaux encore moins, mais le mot avait pris une valeur d’union patriotique qu’il a redécouverte tranquillement de nos jours comme véhicule d’attraction touristique. Le catharisme est devenu une valeur positive d’affirmation identitaire sans risque, hors de toute croyance sinon en la vertu de la publicité, et de promotion des ruines dans des paysages superbes, qui n’avaient certainement pas besoin de ce label pour séduire. Mais, associé à quelques fantaisies ésotériques sur les relations cosmiques des châteaux des Corbières et leurs trésors cachés, en particulier à Rennes-le-Château, et à un vague sentiment latent toujours vivace contre les «estrangers» et les «parisiens», un mot très proche des «pharisiens» de la légende, il ajoute aux arguments touristiques et séduit sans doute le côté mystique des visiteurs rhénans, néerlandais ou britanniques, férus de contes à succès: le Da Vinci Code n’y est pas étranger.