Lacq

(750 Lacquois, 1 706 ha) est une petite commune des Pyrénées-Atlantiques sur la rive droite du Gave de Pau à 25 km ONO de Pau. La commune a absorbé en 1972 sa voisine du nord Audéjos, qui lui a apporté 130 hab., un château du 16e s. et dont les maisons se dispersent dans les collines. Cela lui vaut d’être souvent mentionnée sous la forme Lacq-Audéjos, adoptée par la mairie mais non par l’Insee ni par les dictionnaires de communes. Audéjos a 180 hab. en 2018.

Lacq a été a été rendue célèbre par la découverte de pétrole en 1949 et, surtout, de gaz en 1951, ce qui d’ailleurs n’a eu qu’une incidence modérée sur sa population municipale (440 hab. en 1954, 700 en 1962, stabilité depuis), les travailleurs s’étant logés aux environs et principalement à Mourenx. Le gisement était exploité par Elf; il a culminé à 20 milliards de m3 de gaz par an et 600 000 t de soufre (1975) et a bouleversé la géographie de la distribution du gaz naturel en France; mais il s’est beaucoup réduit (2 milliards de m3 en 2004, 800 millions en 2009) et a fini par être abandonné en 2013.

L’ouverture du gisement s’était accompagnée de la construction d’une centrale thermique à Artix, d’une usine d’aluminium à Noguères et de deux usines chimiques à Pardies et Monts: EDF, Pechiney et Rhône-Poulenc accompagnaient ainsi Elf en un bouquet de grands groupes français. Mais la centrale a été arrêtée dès 1985. L’usine d’aluminium Pechiney, qui avait connu une grève spectaculaire en 1973 avec des revendications d’autogestion, a fermé à son tour en 1991. Un effort de reconversion a été engagé mais, si Pechiney-Rhenalu y a fait fonctionner une nouvelle fonderie en 1992, celle-ci a fermé à son tour en 1999; une fabrique de carreaux de céramique a tenu exactement entre les mêmes dates.

Aujourd’hui, les installations industrielles dérivées ou plus ou moins associées se dispersent dans une douzaine de communes, formant une agglomération de 19 000 hab.; mais les entreprises se sont diversifiées et internationalisées. La plupart des activités industrielles sont concentrées sur quatre plates-formes: Lacq, Mont, Mourenx et Pardies. Total s’est livré à Lacq à une expérimentation de stockage de CO2 en 2010-2012, sur 120 000 t, à 4 500 m sous terre.

À Lacq, travaillent encore 380 salariés chez Elf devenu Total (extraction et traitement du gaz), qui y a aussi un centre de recherche de 100 sal. S’y ajoutent 320 sal. à Arkema (Total) en thiochimie (chimie du soufre) et 170 en organochimie. Le japonais Toray (120 sal.) produit des fibres de carbone. En outre, Aquitaine Isolation fait des travaux d’isolation (130 sal.), Snef (70 sal.) des installations électriques, et Ineo (100 sal.) de la maintenance électrique, Endel de la mécanique (120 sal.); générateurs de vapeur Fives-Nordon (35 sal.), constructions métalliques Troisel (35 sal.); transports Perguilhem (140 sal.), Samat (45 sal.), Bourgey-Montreuil (30 sal.) et BM Chimie (45 sal.); travaux publics Rey-Betbeder (30 sal.); intérim BPS (140 sal.).

Un district de 16 communes a été constitué, puis transformé en 2000 en une communauté de communes de Lacq, dont le siège est à Mourenx et qui est montée à 47 communes (35 000 hab., 53 420 ha); elle a fusionné ensuite avec celle d’Orthez, donnant la communauté de Lacq-Orthez. Une association, dénommée Chemparc en un curieux sabir anglo-français, s’est chargée de coordonner le développement et la reconversion progressive de ce bassin de 5 000 emplois industriels, dont 3 000 dans la chimie (un record en Aquitaine), notamment autour de la chimie fine (pharmacie, cosmétiques, etc.). Le site profond du gisement pourrait servir dans l’avenir à stocker du gaz venu d’ailleurs, et un projet «Crétacé 4 000» vise à l’utiliser pour l’enfouissement de déchets à grande profondeur. La centrale thermique a laissé un lac de barrage de 58 ha, apprécié des pêcheurs, devenu avec ses environs «zone humide» protégée (znieff), espace de préservation des oiseaux et réserve de chasse.

Lacq, Elf et Total

L’histoire de Lacq se confond avec les origines du groupe Elf, non sans un détour en Haute-Garonne. C’est en effet à Saint-Marcet que furent découvertes en 1939 les premières ressources françaises en gaz naturel, menant à la création de la Régie Autonome des Pétroles (RAP) la même année. Le gisement commença à produire en 1942, une usine de traitement étant installée à Boussens en 1943. Ensuite, le Sud-Ouest fut équipé en gazoducs tandis que le gouvernement finançait des recherches par le BRP (Bureau de Recherches Pétrolières), créé en 1945. BRP et RAP fusionnèrent en 1967, formant Elf-Erap, Elf signifiant Essences et Lubrifiants de France. Plus tard, Elf a absorbé la société Antar et couvert le pays de stations-services à son nom.

Par ailleurs et dès 1941, compte tenu des espoirs que laissait entrevoir la structure profonde en plis parallèles du bassin d’Aquitaine au pied des Pyrénées, avait été créée de façon distincte une Société nationale des pétroles d’Aquitaine. La SNPA découvrit du pétrole à Lacq en 1949, puis du gaz en 1951, presque aussitôt exploités. En 1976, SNPA et Elf-Erap fusionnaient sous le nom d’Elf-Aquitaine et sous la présidence de Pierre Guillaumat; l’État en était le principal actionnaire. Tandis qu’Elf-Aquitaine menait une politique mondiale, très discutée depuis, ses activités chimiques fusionnaient avec celles de Total et de Péchiney-Ugine-Kuhlmann en 1983 sous le nom d’Atochem. Enfin Elf passa sous la coupe de Total en 2000, à la suite d’une OPA favorisée par l’État, devenu très minoritaire dans le groupe. Le mot Aquitaine a depuis longtemps été abandonné, le nom d’Elf a fini par disparaître en 2003.

Total est une compagnie issue de la Compagnie française des pétroles (CFP), créée en 1924 par des actionnaires privés, avec une participation de l’État, pour exploiter la part de 23,75 % que les accords de paix consécutifs à la première guerre mondiale avaient accordée à la France en Irak. Le nom Total est apparu en 1954 pour les carburants, mais n’est devenu le nom officiel de la compagnie qu’en 1991.