Morvan

ensemble montagneux au centre de la Bourgogne; l’adjectif habituel est morvandiau. Culminant à 901 m au Haut Folin, le Morvan n’est pas une vraie montagne, mais un massif de hautes terres. Il se voit à peine des plateaux du Dijonnais qui dépassent déjà 600 m, mais peut apparaître plus imposant depuis les petites plaines qui l’entourent. Ses bois lui donnent de loin cette teinte sombre qui l’a fait nommer Morvan, c’est-à-dire en celte Montagne Noire, comme il en existe d’autres au sud du Massif Central ou en Bretagne par exemple.

Il s’agit d’un bloc soulevé du socle cristallin, d’environ 70 km du sud au nord et 40 d’est en ouest. Il prolonge le Massif Central vers le nord-est, et il a été basculé vers le nord-ouest: les plus hauts sommets sont vers l’est, surtout le sud-est. Toutes ses eaux coulent vers la Seine et la Loire: la ligne de partage entre Atlantique et Méditerranée passe plus à l’est, dans la Montagne bourguignonne et par Le Creusot. Il n’est d’ailleurs pas un considérable «château d’eau», dont ne sortent guère que l’Yonne, la Cure et le Cousin d’un côté, l’Arroux et ses tributaires de l’autre; mais sa situation générale et son altitude lui valent d’être un lieu d’assez fortes pluies et de neiges. Le flottage des bois a pu être pratiqué sur la Cure et l’Yonne, et plusieurs grands lacs-réservoirs (les Settons, Pannecière, Chaumeçon, Crescent, Saint-Agnan, Champeau) ont ensuite été aménagés à partir du 19e siècle derrière de solides barrages, notamment afin de contribuer à réduire les débordements de l’Yonne qui menaçaient Paris.

Par ses formes et sa situation, le Morvan a été en Bourgogne un lieu de refuge et d’isolement, une sorte de bout du monde éloigné des villes, réputé dur et froid. Il s’est peuplé de familles plutôt pauvres, vivant de la forêt et d’élevages menus; la proximité relative de Paris y a encouragé l’émigration, notamment celle de femmes qui s’engageaient comme nourrices, et l’accueil de jeunes enfants, les «petits Morvan» plus ou moins à l’abandon. La parcimonie des herbages a conduit le massif à se spécialiser comme «pays naisseur», alimentant en veaux et génisses les gras pâturages de plaine. Depuis les années 1950, plusieurs communes se sont lancées avec succès dans la plantation de résineux pour la fourniture de sapins «de Noël».

Le tourisme est devenu un complément apprécié, et pour certaines communes l’essentiel; mais il est limité à l’été, seul le Haut Folin pouvant se targuer d’une petite station de ski dans la commune de Saint-Prix (Saône-et-Loire). Les sites les plus appréciés sont ceux des environs du mont Beuvray à cause de Bibracte, des hauts villages, des lacs, des cascades et des gorges, des chaos granitiques toujours surprenants, surtout vers Montsauche-les-Settons. Le Morvan est traversé par la route de Nevers à Autun par Château-Chinon, ancienne nationale 78 déclassée en D978; il eut une voie ferrée héroïque de Corbigny à Saulieu, mais seulement de 1901 à 1939.

Le Parc naturel régional du Morvan a été délimité dès 1970. Couvrant 258 000 ha, dont 125 000 en bois, 105 000 ha cultivés, 7 000 de zones humides et 1 600 de plans d’eau, il associe dans quatre départements 107 communes (36 000 habitants) et 8 «villes-portes» (32 000 hab.), plus Uchon qui est un peu à part mais lui apporte son chaos granitique. Il est un peu plus étendu que le Morvan géologique, allant de Vézelay à Luzy, et bien au-delà de Saulieu dans le pays de Thil. Le Parc a son siège et ses expositions à Saint-Brisson (Nièvre) et a soutenu quelques initiatives orientées vers le tourisme.

Autour du Morvan, l’érosion a dégagé des «dépressions périphériques» dans les marnes du Lias, dominées vers l’extérieur par les plateaux de roches dures jurassiques. C’est typiquement le cas du Bazois à l’ouest, de l’Auxois à l’est, par où se faufilent des routes et les canaux du Nivernais et de Bourgogne. Ces petites plaines aux formes irrégulières offrent de belles pâtures pour l’embouche de charolais, et même des labours en Auxois. Elles sont plus étroites au nord, où les plateaux rasent le massif, et quasi absentes au sud hors de la vallée même de l’Arroux, car d’autres plateaux cristallins subsistent entre Morvan et Charolais.

Vu des villes préfectures, le Morvan reste un fragment de bout du monde, plus qu’une entité homogène. Il est divisé entre les quatre départements bourguignons. De la sorte, le traitement de ses affaires manque de coordination, hors du domaine du Parc. Il a été toutefois un peu mieux assuré dans la Nièvre, qui en a la meilleure part (47 communes sur 107) et le principal bourg, Château-Chinon, bénéficiant durablement des actions et du rayonnement du président Mitterrand.

La région forestière du Morvan est proche du Parc, avec 257 000 ha dont 125 000 de forêt de production, incluant 47 000 ha de résineux, et 113 000 ha de terres d’élevage et de culture. La région agricole du Morvan s’étend sur 125 communes; on y a compté environ 2 000 exploitations agricoles dont deux tiers de «professionnelles», 76 000 vaches et 32 000 brebis. Le sapin de Noël, introduit en Morvan vers 1930, se limite à 250 propriétaires et 900 ha, en rotation décennale: les 90 ha rasés chaque année fournissent tout de même 720 000 «sapins», qui sont d’ailleurs ici surtout des épicéas.