l’une des parties les plus connues du territoire de la France, dont parlent tous les manuels de géographie et d’histoire. À vrai dire, il est quasi imperceptible; de surcroît, il est multiple. Mais il a longtemps figuré comme limite du pouvoir parisien, et comme passage entre un Nord et un Sud en partie réels, en partie fantasmés. Dans l’histoire, il rappelle plusieurs événements, qui tous mettent en jeu la suprématie «parisienne»: la victoire de Clovis sur les Wisigoths d’Alaric en 507, racontée bien plus tard par Grégoire de Tours (v. Vouillé); l’arrêt des invasions arabes, assuré par Charles Martel en 732 (v. Vouneuil-sur-Vienne); la défaite de Jean le Bon en 1356, qui donna aux Anglais la maîtrise du Poitou (v. Nouaillé-Maupertuis); l’installation du pouvoir royal par le dauphin Charles exilé de Paris (1417-1436) avec la venue — provisoire — du Parlement (1423), et la création — durable — d’une université (1431). Un comté de Poitou, établi sur le «seuil», a balancé durant plusieurs siècles entre autonomie et possession royale, avant de devenir province. Mais de quoi est fait le «seuil» ? Il a plusieurs dimensions. L’une est géologique: il correspond à l’endroit où les affleurements des terrains anciens du Massif Central (le bas plateau du Limousin) et ceux du Massif Armoricain sont les plus proches; cela se situe un peu au sud de Poitiers, à la hauteur de Vivonne, où d’ailleurs des terrains anciens affleurent dans le lit du Clain. Cette position à la fois haute (dans le sens NE-SO) et basse (dans le sens SO-NE) du socle marque bien, tout ensemble, le contact des deux massifs et celui des deux bassins sédimentaires, le Parisien et l’Aquitain. Elle est renforcée et élargie par l’épandage de dépôts superficiels issus du Massif Central, qui introduisent des «terres froides» et des paysages de landes de part et d’autre de Poitiers, dans les Brandes, «grandes» et «petites». Poitiers est du côté «parisien», mais très proche de ce seuil. Le seuil topographique est plus méridional. Également de direction SE-NO, il passe plutôt par le talus qui domine Lezay, séparant le bassin du Clain, donc de la Loire, de ceux des petits fleuves charentais. Le seuil historique est même plus méridional encore: la limite provinciale était marquée par une sorte de marche plus ou moins boisée, dont subsistent sur un plateau l’alignement des forêts de Chizé et d’Aulnay, qui se poursuit jusqu’à la Charente; le pays de Ruffec était poitevin avant que le Poitou ne soit divisé en trois départements (Vendée, Deux-Sèvres et Vienne). Pour un seuil à peu près imperceptible dans les paysages, tout est dans la complexité et la subtilité… |