aire d’appellation viticole définie en 1909, puis 1938 et 1978. Elle est limitée aux départements de Charente et Charente-Maritime, à l’exception de quelques communes des Deux-Sèvres (au sud-ouest de Niort) et de Dordogne (autour de La Roche-Chalais et Saint-Aulaye), et vise la production d’eau-de-vie. L’origine de la spécialité est ancienne: le vin local a très tôt été acheté par les Hollandais et les Anglais qui venaient chercher du sel. Mais comme le vin blanc n’était pas de très grande qualité et se conservait mal, le vignoble se convertit rapidement à la distillation, autour de 1600, pour fournir les marins de l’Europe du Nord-Ouest, et bien d’autres, en brandevin, ou brandy en anglais, c’est-à-dire en vin brûlé. Depuis, les méthodes de distillation se sont perfectionnées et réglementées. Le vignoble de Cognac était parvenu à 300 000 ha et 15 millions d’hectolitres vers 1870. La crise du phylloxéra a été très dure, mais le vignoble fut replanté et il est encore aujourd’hui le plus grand vignoble de vin blanc du Monde, tout en ne fournissant guère de vin blanc… Il couvre environ 75 000 ha et tout a été fait pour accroître les rendements, qui atteignent 140 à 150 hl/ha (160 en 2004), et jusqu’à 250 hl localement, en moyenne environ 100 hl/ha. Le cépage est à peu près partout l’ugni blanc, qui donne des vins secs, acides, assez peu alcoolisés (9°); ils sont vinifiés sans antioxydant ni antiseptique et le moût est immédiatement mis en cuve avant la distillation, qui se fait de novembre à mars. La production annuelle d’alcool pur est de l’ordre de 650 000 hl, pour une récolte de 6,6 Mhl de vin; elle a oscillé entre 800 000 en 1990 et 300 000 en 1999. L’eau-de-vie vieillit ensuite en fûts de chêne, durant un nombre d’années variable où se perd, par évaporation de l’alcool, entre 3% et jusqu’à un bon tiers de la récolte (et même plus de la moitié pour des cognacs de plus de 40 ans), la fameuse «part des anges» dont les vapeurs nourrissent les microscopiques champignons noirs qui couvrent les toits des chais. Les stocks sont d’environ 3 Mhl d’alcool pur (l’équivalent de six années de production), représentant un milliard de bouteilles. Les qualités dépendent de la zone de récolte et de distillation, de l’entreprise elle-même, et de l’âge. Les trois étoiles sont les plus jeunes (trente mois de vieillissement au moins); les VSOP (very superior old pale) sont plus vieux, les VO (very old) ayant au moins 4 ans et demi, les Réserve davantage; d’autres noms, dont Napoléon, XO, etc., sont donnés aux plus vieilles eaux-de-vie. Fine est un terme général pour les eaux-de-vie de l’appellation cognac, assortie de précisions selon les terroirs. Le Vignoble est divisé en aires concentriques de qualité décroissante. Au centre est la Champagne (Grande), correspondant à la plaine au sud de Cognac et Jarnac, autour de Segonzac; elle compte 25 000 ha, dont 14 000 ha de vignes, et fournit 17% de la récolte de vin, mais davantage en valeur. Elle est entourée, au sud du fleuve seulement, par l’aire de la Petite Champagne, qui va jusqu’à Jonzac et compte 50 000 ha; dont 16 700 en vignes. Au même niveau se situe au nord-ouest de Cognac, donc rive droite, le petit plateau des Borderies (6 900 ha dont 4 300 en vignes). Tout ce premier ensemble est entouré par la large auréole des Fins Bois, beaucoup plus étendue au nord et à l’est qu’aux environs de Jonzac; elle englobe Angoulême et ses Côtes jusqu’à Villebois-Lavalette, Mansle au nord-est, et va jusqu’à Saint-Jean-d’Angély au nord-ouest; une enclave s’ajoute au sud-ouest autour de Mirambeau, jusqu’au rivage de la Gironde; l’ensemble mesure 233 000 ha, dont 34 500 en vignes, soit 14%. Tout autour s’étend l’aire des Bons Bois (217 000 ha dont seulement 10 600 en vignes, 5%). Enfin l’aire des Bois ordinaires prolonge la précédente vers l’ouest dans l’Aunis et sur toute la côte atlantique, îles comprises, plus une annexe au sud-est du côté de La Roche-Chalais; mais elle compte peu de vignes (1 700 ha sur 153 000, soit 1,2% de la surface) et ne fournit qu’un à deux centièmes de la production. Celle-ci se partage également entre les départements de Charente et Charente-Maritime, avec une certaine tendance à la concentration. Un peu plus de 6 000 exploitants déclarent des récoltes. Les ventes annuelles de cognac ont approché 200 millions de bouteilles (70 cl à 40°) en 2017 (plus de 3 milliards d’euros au départ des Charentes). Elles sont assurées presque entièrement par des négociants. Parmi ceux-ci, la pénétration des capitaux britanniques ou même hollandais a été forte et plusieurs noms de marque en portent la trace, dont le doyen Martell, fondé par un habitant de Jersey dès 1715; ou Thomas Hine, venu du Dorset et établi en 1791; Otard dit descendre d’un viking Ottar, dont la famille s’était établie en Écosse avant de s’exiler en France où un Otard fut fait baron en 1701… Plus récemment, l’industrie du luxe s’est fort intéressée au cognac en même temps qu’au champagne, comme en témoigne la firme LVMH, qui associe depuis 1987 à Louis Vuitton les noms de Moët (champagne) et de Hennessy (cognac), déjà réunis en 1971; la firme Hennessy a été créée à Cognac en 1765 par l’Irlandais Richard Hennessy (1724-1800), dont les services rendus au roi de France lui avait valu de recevoir des terres en pays de Cognac. Le taux d’exportation du cognac est de 93%, pour un chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 3 250 millions d’euros. La France (4,3 millions de bouteilles, en baisse) en consomme moins que l’Allemagne (5,5 M, en baisse) ou le Royaume-Uni (10 M). Le deuxième importateur, en net progrès, est la Chine (26 M), assortie de Hong Kong (3,5) et suivie de Singapour (24 M) qui ravitaille le reste du marché asiatique. Le Japon, qui achetait plus de 28 M de bouteilles en 1990, s’est presque effacé. En Europe, la Lettonie (3,9 M) devance à présent les Pays-Bas (2,9); l’Afrique du Sud est montée à 2,6 M de bouteilles. On estime que 60 000 personnes «vivent du cognac», dont 17 000 personnes actives: 4 300 producteurs (10 000 actifs), 3 000 dans la distillation et le négoce (dont 4 coopératives), 3 900 dans les activités induites (carton, verre, imprimerie, tonnellerie, bouchage, transport, etc.). Le vignoble produit aussi du pineau, mélange de trois quarts de moût légèrement fermenté et d’un quart de cognac, et titrant 17,5°; environ 700 producteurs consacrent 5 000 ha de vignes à cette production, qui se monte à 120 000 hl par an et consomme environ 20% de la production de cognac. La production de vins de pays vendus comme vins, en blanc, rouge ou rosé, est mineure: environ 100 000 hl/an, dont 37% en rouge et 18% en rosé; des cépages colombard et montils s’ajoutent alors à l’ugni. |