fleuve originaire des Alpes, le plus puissant à l’intérieur de la région Auvergne-Rhône-Alpes et à l’intérieur du territoire national. Long de 812 km, il naît du glacier de la Furka dans le massif du Saint-Gothard en Haut-Valais, sous le nom alémanique de Rotten. Il traverse le Valais et alimente le lac Léman. Il entre en France à la limite des départements de l’Ain et de la Haute-Savoie, entre Pougny et Vulbens, et franchit presque aussitôt une barre du Jura au défilé de l’Écluse; il passe à Bellegarde-sur-Valserine où il reçoit à droite la Valserine, puis coule vers le sud. Il franchit le barrage de Génissiat (1948, 67 m de chute, 420 MW, 1 700 GWh/an), qui retient 58 Mm3 d’eau et dont le plan d’eau mesure 400 ha. Il se faufile entre les deux Seyssel, où un barrage plus discret stocke 5,8 Mm3 d’eau et dont la centrale produit annuellement 150 GWh. Le fleuve reçoit ensuite le Fier à gauche puis longe la Chautagne sur la même rive, où un canal de dérivation sur la droite, long de 8 km, alimente la centrale électrique de Chautagne face au village de Serrières; entrée en production en 1981, elle a une chute de 17 m, 90 MW installés et produit 450 GWh/an. Ensuite le Rhône laisse Culoz à droite tandis qu’à gauche lui parvient le canal de Savières, exutoire du lac du Bourget. Ses eaux divergent à nouveau entre un cours principal qui va droit vers le sud, et un tortueux canal de dérivation grossi du lac du Lit du Roi, qui reçoit de droite le Séran, passe au ras de Belley et fait tourner l’usine électrique de Brens, dite de Belley, de mêmes caractéristiques que la précédente (1981, 17 m de chute, 90 MW, 450 GWh/an). À Yenne, le fleuve tranche un pli du Jura dans le défilé de Châtel, retrouve à droite les eaux dérivées par Belley et reçoit aussitôt après le Furan qui descend du Jura. Il va jusqu’à Saint-Genis-sur-Guiers où il accueille le Guiers et change brusquement de direction vers le nord-ouest. Ce coude est recoupé à Izieu par un troisième canal de dérivation qui est utilisé par la centrale de Brégnier-Cordon (1984, 14 m de chute, 70 MW, 325 GWh/an). Le Rhône longe les reliefs plissés du Bugey et, à gauche, les installations fermées de l’ex-surgénérateur nucléaire Phénix. L’usine électrique de Sault-Brénaz, sur un très court canal d’alimentation, a été équipée en 1986 et offre 10 m de chute, 45 MW, 245 GWh/an. Peu après à Lagnieu, le fleuve sort des reliefs et coule à nouveau vers le sud-ouest. Passé Loyettes, il reçoit à gauche la Bourbre, puis à droite l’Ain et se dirige vers l’ouest. Le barrage de Jons le divise entre canal de Miribel au nord et canal de Jonage au sud, où il impulse la centrale de Cusset, ouverte en 1899 (12 m de chute, 7 MW à l’origine et 74 MW à présent). Ces deux bras et le cours du Vieux Rhône se réunissent à l’entrée de Lyon où le Rhône longe le parc de la Tête d’Or, vire et prend définitivement un cours nord-sud, accueille la Saône à droite et anime le port Édouard-Herriot. Juste en face commence le canal de dérivation de Pierre-Bénite, qui court jusqu’à la hauteur de Grigny sur plus de 10 km, et le long duquel a pris place la raffinerie de pétrole de Feyzin. La centrale de Pierre-Bénite, entrée en service en 1966, a 9 m de chute, 80 MW de puissance et apporte 535 GWh/an. Le Rhône fait un coude à Givors où il reçoit à droite le Gier, puis un autre devant Vienne où arrive à gauche la Gède, en s’enfonçant dans les terrains anciens du Massif Central. La centrale électrique de Vaugris (à Reventin-Vaugris) est la seule, hormis Génissiat, à être installée directement sur le Rhône; inaugurée en 1980, elle a une puissance de 72 MW et produit annuellement 335 GWh. Le fleuve atteint ensuite Condrieu et dessine trois méandres, reçoit à droite la Varèze à Saint-Alban-du-Rhône et passe devant la centrale nucléaire de Saint-Maurice-l’Exil. Un nouveau canal de dérivation s’ouvre en amont du Péage-de-Roussillon, tandis que le cours naturel du Rhône longe les reliefs ardéchois et passe dans la réserve naturelle de l’île de la Platière. Le canal, long de 11 km, s’achève devant Saint-Rambert-d’Albon, après avoir accueilli à gauche les apports de la Sanne et du Dolon au débouché de la plaine de Bièvre-Valloire. La centrale, dite de Péage-de-Roussillon, date de 1977; avec 15 m de chute, elle offre 160 MW et fournit 850 GWh/an. Ensuite le fleuve passe entre Andance et Andancette, reçoit à droite la Cance qui vient d’Annonay, et entre à nouveau dans les terrains cristallins par le défilé de Saint-Vallier où débouche à gauche la Galaure. À la hauteur de Serves-sur-Rhône, un nouveau bief sur la gauche, mais court (4 km), mène à la centrale électrique, proche de Gervans et dite de Saint-Vallier (1971, 11,5 m de chute, 120 MW, 700 GWh/an). Puis le Rhône franchit un nouveau défilé, celui de Tain-Tournon, aux versants escarpés couverts par les vignes de l’Hermitage; il y reçoit à droite le Doux. À La Roche-de-Glun s’ouvre encore à gauche un autre canal de dérivation, qui accueille les eaux de l’Isère et alimente l’usine électrique de Bourg-lès-Valence (1968, 11,7 m de chute, 186 MW, 1 100 GWh); il s’achève devant Valence. Après Valence, le fleuve reçoit à droite le Mialan. À Charmes-sur-Rhône s’ouvre un nouveau canal, mais sur la droite, long de 6 km, qui sert la centrale de Beauchastel (1963, 11,8 m de chute, 192 MW, 1 200 GWh/an). Le Rhône fixe la totalité de la limite orientale du département de l’Ardèche; il y reçoit successivement la Cance, le Doux, l’Eyrieux, l’Ouvèze, et finalement l’Ardèche, dont le confluent signale l’angle sud-est du département. Sa rive est suivie par la N 86 et une voie ferrée désormais affectée au trafic de marchandises. Les deux ont souvent du mal à s’insérer dans le peu de place que laisse un relief très escarpé; le massif ancien borde en effet le Rhône au nord de La Voulte, tandis que les reliefs calcaires des Gras et volcaniques du Coiron s’élèvent également au-dessus du fleuve. Aussi, de ce côté du Rhône, les villes sont-elles peu nombreuses et de taille modérée: du nord au sud Tournon-sur-Rhône, des banlieues de Valence comme Guilherand-Granges, La Voulte-sur-Rhône, Bourg-Saint-Andéol. Les principaux centres du Vivarais, Annonay, Privas, Aubenas, se tiennent à l’écart du fleuve. Sur la gauche, la Vèbre rejoint le fleuve, puis la Drôme lui parvient. Un nouveau barrage, dit de Loriol, envoie le principal du débit dans le canal de rive gauche, long de 9 km, vers l’usine du Logis-Neuf (1960, 14,8 m de chute, 210 MW, 1 200 GWh/an). Puis les eaux réunies passent en un cours très élargi devant Cruas et sa centrale nucléaire, reçoivent à droite le Lavezon, et se divisent à nouveau devant Rochemaure; à droite, le Rhône «sauvage» passe devant Le Teil. Le canal court sur 13 km et reçoit à gauche les eaux réunies du Roubion et du Jabron à Montélimar, puis il rejoint le vieux Rhône devant Viviers. La centrale de Montélimar, de 1957, a une chute de 16,5 m et une puissance de 270 MW; elle fournit au réseau 1 600 GWh/an. Le Rhône franchit alors le défilé de Donzère. Le canal de Donzère-Mondragon, le plus long de tous les aménagements rhodaniens (24 km), longe la centrale nucléaire du Tricastin et les vastes installations nucléaires de Pierrefitte et dirige ses eaux vers la centrale dite de Donzère-Mondragon, située à Bollène, la plus ancienne du Rhône inférieur (1952) et la plus puissante (chute de 22,5 m, 354 MW, 2 100 GWh/an). Le canal est sorti de la région Rhône-Alpes entre les deux centrales et ne rejoint qu’entre Mondragon et Mornas l’ancien cours, éloigné jusqu’à 7 km à l’ouest à la hauteur de Lapalud et Bollène, qui a longé Pont-Saint-Esprit et y a reçu l’Ardèche. Le large cours des eaux réunies s’étale sur 600 m et passe devant les installations nucléaires de Marcoule et de l’ensemble industriel de l’Ardoise, où sont la dérivation et la centrale de Caderousse (1975, 9,5 m de chute, 156 MW, 860 GWh/an) composent avec deux méandres anciens du Rhône, puis devant Roquemaure. Un nouvel ensemble de barrages et canaux se déploie juste en amont d’Avignon, compliqué par le tracé d’un ancien grand méandre du fleuve et la confluence de l’Ouvèze à gauche. Les deux centrales d’Avignon, de 1973, ont 10 et 9,5 m de chute, 120 et 60 MW de puissance installée, et fournissent ensemble 935 GWh/an. Après Avignon, le Rhône va vers le sud-ouest, accueille à gauche les flots de la Durance, et passe devant le site industriel d’Aramon. Devant Vallabrègues, il revient vers le sud et coule entre Beaucaire et Tarascon dans un nouvel aménagement, au bief court, où il reçoit à droite le Gardon, et un peu plus loin le canal de Sète au Rhône. La centrale de Vallabrègues, de 1970, a une chute de 13,5 m et une puissance de 210 MW, pour une production annuelle de 1 300 GWh. Juste avant Arles, les eaux du Rhône diffluent à nouveau, mais naturellement: à droite le Petit Rhône va vers l’ouest, à droite le Grand Rhône baigne les quais d’Arles, envoie un peu d’eau dans le canal d’Arles à Fos et file vers le sud puis le sud-est, les deux enserrant le delta de la Camargue. Le Petit Rhône se divise à son tour en deux bras de part et d’autre de la Petite Camargue, tandis que le Grand Rhône pousse loin au sud ses alluvions jusqu’au-delà de Port-Saint-Louis-du-Rhône, ville où s’ouvre le canal Saint-Louis qui mène au golfe de Fos. La superficie du bassin-versant du Rhône est d’environ 100 000 km2 dont 8 000 en Suisse. Son débit moyen est de 300 m3/s à la sortie du lac de Genève, 600 m3/s à Lyon, 1 800 m3/s à l’embouchure. Les étiages sont en août, les maxima en hiver, ce qui indique un régime essentiellement pluvial, avec des crues décennales de plus de 3 000 m3/s à Lyon, 9 200 à Beaucaire. La crue du début décembre 2003 a atteint 13 000 m3 à Beaucaire (débit instantané). Le Rhône a un courant puissant, qui posait de sérieux problèmes à la navigation mais promettait beaucoup par son énergie disponible. Les premiers travaux d’aménagement ont été partiels et dispersés. Le premier barrage sur le Rhône remonte à 1874: édifié à Bellegarde, il fut suivi en 1883 d’un barrage sur la Valserine et Bellegarde fut une des premières villes françaises à bénéficier de l’électricité. Peu après, Lyon bénéficiait, juste en amont de la ville, du creusement des canaux de Miribel et de Jonage et de la centrale électrique de Cusset, qui relève actuellement d’EDF et dont la mise en service est antérieure à 1900. La décision de parvenir à un aménagement intégré et coordonné date des années 1920; les travaux devaient à la fois permettre de transférer une part de l’énergie du fleuve à des centrales électriques, de réduire la vitesse des eaux et de faciliter ainsi la navigation, de réduire les effets de ses crues, d’améliorer ses traversées et même de préserver quelques réserves naturelles. Ainsi fut fondée la Compagnie nationale du Rhône (CNR), créée en 1933 comme organisme public. Elle a construit ses grands aménagements entre 1946 et 1986, le premier barrage, Génissiat, ayant été commencé avant la guerre et mis en service en 1948. Son action s’étendait aussi à la Saône, rendue accessible au trafic fluvial lourd jusqu’à Chalon-sur-Saône puis à Seurre dans le Dijonnais. Mais la CNR a échoué dans son ambition de construire une grande liaison fluviale Rhin-Rhône. La compagnie a été dotée de nouveaux statuts en 2003, qui en font un gros vendeur d’énergie électrique et une société à moitié privée: le groupe d’origine belge Electrabel d’Albert Frère, intégré au groupe Suez et actuellement sous le nom d’Engie, possède 49,97% des parts, contre 33,20 à la Caisse des Dépôts et Consignations représentant l’État français, 16,83% à un ensemble de collectivités locales, principalement les douze départements traversés. Electrabel a encore davantage de parts dans la filiale Énergie du Rhône, puisque celle-ci appartient à la CNR pour 51% et à Electrabel pour 44%, la Caisse des Dépôts se contentant de 5%. La CNR exploite seule depuis 2006 les centrales électriques du Rhône, qui sont toutes pilotées à partir de Lyon. Elle fournit ainsi le quart de l’hydroélectricité en France, environ 16 TWh (milliards de kilowatts-heures) par an. Elle a également créé en 2006 un parc éolien à Fos-sur-Mer, suivi de nombreux autres, surtout dans l’ouest et de nord de la France, et quantité de parc photovoltaïques, tous dans le Sud; elle déborde ainsi très largement du bassin rhodanien et se place comme le premier producteur français d’énergies renouvelables. . Actuellement, le Rhône est utilisé par trois ouvrages en Suisse et dix-neuf en France: d’amont en aval, Génissiat-Seyssel (deux centrales), Chautagne, Belley, Brégnier-Cordon, Sault-Brénaz, Pierre-Bénite, Vaugris, Péage-de-Roussillon, Saint-Vallier, Bourg-lès-Valence, Beauchastel, Baïx-Logis-Neuf, Montélimar et, hors de la région Rhône-Alpes, Donzère-Mondragon, Caderousse, Avignon (deux centrales) et Vallabrègues. Il faut y ajouter l’ensemble des barrages de Vons et de Jonage-canal de Jonage-centrale de Cusset en amont de Lyon, qui ne relèvent pas de la CNR. Les aménagements comprennent aussi quatorze écluses à grand gabarit de Lyon à Fos-sur-Mer, dont treize ont 195 m de long et 12 m de large. Elles acceptent des puissants automoteurs du Rhône (1 300 t) et les convois poussés de 4 400 t, ainsi que les bateaux de plaisance. Le trafic fluvial annuel est de 5 à 6 Mt et 100 000 passagers et nécessite environ 100 000 éclusages, dont près d’un dixième la nuit . Par tous ces travaux, la vallée inférieure, en aval de Lyon, est l’un des couloirs les plus actifs et les plus fréquentés du territoire national, partie du grand axe séquano-rhodanien. Le Rhône y marqua longtemps la frontière entre royaume de France et Empire germanique, au point que pour les bateliers riaume signifiait rive droite et empi rive gauche. Le couloir est emprunté par trois voies ferrées, l’une sur la rive droite réservée au fret, la grande ligne classique Paris-Lyon-Méditerranée proche de la rive gauche, la ligne à grande vitesse prenant des libertés avec le fleuve, dont elle s’éloigne du côté de Valence mais qu’elle traverse à Vénéjan et à Avignon. Y passent aussi la N86 rive droite, la N7 et l’autoroute du Soleil rive gauche et, enterré, un considérable faisceau de conduites de gaz et de pétrole qui va jusqu’au Rhin et au Danube en Bavière; mais une seule raffinerie de pétrole est établie, à Feyzin en aval de Lyon. Ce couloir est également devenu un lieu de l’industrie nucléaire, avec les installations de traitement de Pierrefitte et de Marcoule, et les centrales de Saint-Alban-Saint-Maurice, de Cruas et du Tricastin. Toutes ces installations ont attiré de nombreuses usines, ce qui n’a pas manqué de poser des problèmes de pollution des eaux, qui défraient périodiquement la chronique. Très chargé en alluvions issues des montagnes de son bassin, le Rhône a construit en Méditerranée un énorme delta que son poids même tend à enfoncer, et dont la Camargue n’est que la partie émergée. Au Quaternaire, les glaciers du Rhône ont débordé sur le piémont jusqu’à Lyon, où subsistent quelques blocs erratiques laissés par la fonte des glaces. Le Vieux Rhône est un bras du Rhône en amont de Lyon, qui sinue dans la plaine de captage des eaux entre les canaux de Miribel et de Jonage à l’aval du lac de Miribel. Le bassin Rhône-Méditerranée est un cadre d’action des services compétents du territoire français dans la gestion des ressources hydrauliques; il est coordonné par le préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes à Lyon. Il s’étend sur 128 000 km2 et sur tout ou partie de 28 départements . Le nom du Rhône est porté par une région (Auvergne-Rhône-Alpes), deux départements (Rhône et Bouches-du-Rhône) et plusieurs communautés de communes. |