(112 600 Rouennais, 2 138 ha) est la préfecture de Seine-Maritime. La ville occupe un site caractéristique de fond d’estuaire, en aval duquel la marée devient sensible et qui a permis d’établir un port maritime aussi près que possible de Paris. Le site a été repéré fort tôt; il fut celui l’antique Rotomagus, chef-lieu de la tribu des Véliocasses, d’où vient le nom de la ville avec pour sens «marché du gué». Il fut choisi ensuite à partir du traité de Saint-Clair-sur-Epte (911) comme chef-lieu du nouveau duché de Normandie. Rouen en a gardé le privilège durant tout l’Ancien Régime. Elle fut anglaise de 1418 à 1449, assez pour s’illustrer par le procès de Jeanne d’Arc (1434), héroïne que pourtant elle ne cesse d’honorer depuis. La fonction ducale et la fonction maritime combinées lui valurent des phases de réelle prospérité bourgeoise aux temps de la Renaissance, puis de l’industrie et du grand commerce des 17e et 18e siècles. Au 19e s., les vallées voisines se peuplèrent d’industries, surtout textiles. Au 20e siècle, le raffinage du pétrole réussit à remonter la Seine jusqu’aux abords de Rouen et le textile céda la place à la chimie, à la papeterie et à bien d’autres activités, tandis que la fonction de métropole régionale s’affirmait encore. La proximité de Paris, qui est à moins d’une heure, n’a pas manqué à la fois de lui apporter des activités, et aussi de lui créer de réels problèmes d’évasion et de concurrence: Rouen, ville de la «couronne» parisienne la plus proche de la capitale (avec Orléans), tient tout ensemble du chef-lieu provincial, du port maritime et fluvial et du noyau de grande banlieue, à la fois ouvrier et bourgeois. Le centre-ville est l’un des plus riches de France en monuments, architectures, musées et souvenirs. Il se tient dans la plaine de rive droite, au pied du grand coteau du mont aux Malades (Le Mont-Saint-Aignan) et du mont Fortin (Bois-Guillaume), entre les débouchés des vallées du Robec et du Cailly. Il est ceint d’une large ceinture de boulevards et conserve un plan quadrillé dont l’origine remonte en partie aux temps romains: les rues Thiers (devenue Jean Lecanuet), du Gros-Horloge et des généraux Giraud et Leclerc en sont les principaux axes est-ouest, les rues Jeanne-d’Arc et de la République et, entre elles, l’alignement des rues du Grand Pont, des Carmes et Beauvoisin en sont les trois principaux axes transverses. La partie la plus ancienne et la plus pittoresque est, un peu vers l’ouest, celle du Vieux Marché; on y voit de nombreuses maisons à colombage et des hôtels bourgeois comme celui de Bourgtheroulde, les musées Corneille et Jeanne d’Arc, un marché, une église moderne (1979) à beaux vitraux dédiée à sainte Jeanne-d’Arc. Un peu à l’est, le Gros Horloge, du 16e siècle, rétrécit la rue du même nom, la plus célèbre de Rouen, et voisine avec le beffroi du 14e siècle. Tout près se dresse le vaste palais du Parlement, du 16e s., surchargé de décors flamboyants et qui marque le centre du vieux Rouen. Vers le nord apparaît un autre ensemble, autour du grand et très riche musée des Beaux-Arts, un ample bâtiment du 19e siècle; il est flanqué des musées de la Céramique et Le Secq des Tournelles (traditions et outillages) et de l’église Saint-Godard (15e et 16e s.), de style flamboyant, appréciée notamment pour ses vitraux; non loin se dresse la tour Jeanne d’Arc, ancien donjon du château fort de Rouen du 13e s., très restauré au 19e. Un quatrième élément du centre-ville, au sud-est, est marqué par la cathédrale, construite du 12e au 16e s., l’un des plus beaux édifices gothiques de France, qui fut très abîmée par des bombardements d’avril 1944 et heureusement restaurée. L’une de ses tours a reçu au 19e siècle une flèche de fer; l’autre, assez écartée, porte l’aimable nom de tour de Beurre, qui n’est pas une allusion à son apparence mais au fait que sa construction a été financée au Moyen Âge par les exemptions de carême, permettant aux crémiers et à leurs clients fortunés de graisser le maigre… La cathédrale est flanquée par le Palais des Congrès et prolongée vers l’est par l’église et l’aître Saint-Maclou. Au sud, près de la Seine, subsistent le petit édifice renaissance de la Fierté Saint-Romain et le bâtiment restauré de l’ancienne Halle aux Toiles. Vers le nord se situe un autre ensemble monumental, autour de l’hôtel de ville du 19e siècle, qui s’appuie sur l’église Saint-Ouen, grand édifice du gothique rayonnant. On y voit les musées de l’Éducation nationale au SE, des Antiquités et d’histoire naturelle au nord, passé le vénérable et illustre lycée Corneille qui occupe un ancien couvent. Les boulevards encadrent à l’est de ce centre monumental le quartier Saint-Vivien, jadis de tradition populaire; il abrite principalement les amples installations du centre hospitalier universitaire, appuyées au sud à Martainville par la Faculté de médecine. Entre le CHU et la Seine ont pris place le nouveau marché, l’hôtel de région et l’esplanade du Champ de Mars, tandis que l’angle SE des boulevards était transformé en vaste complexe d’échangeurs d’où partent le grand pont Mathilde, l’A28 et les routes vers Paris. Le pont Mathilde, inauguré en 1979, porte le nom de la duchesse Mathilde, petite-fille de Guillaume le Conquérant; il traverse l’île Lacroix, habitée, qui abrite piscine, patinoire, club nautique et port fluvial. Vers l’aval, toujours rive droite mais au-delà des boulevards, un autre noyau rassemble dans le quartier de la Madeleine l’Hôtel-Dieu et le musée Flaubert, consacré à l’histoire de la médecine et complété par un jardin de plantes médicinales; la préfecture et plusieurs administrations; la Faculté de droit et ses annexes de l’avenue Pasteur tels l’Institut d’administration des entreprises et l’Institut de préparation à l’administration générale (IPAG); la direction du Port autonome. Sur la rive gauche, accessible par quatre autres ponts routiers, tous construits ou reconstruits entre 1952 et 1970, a été édifiée une vaste cité administrative moderne qui abrite l’hôtel du département, exactement en face du centre-ville. Autour de ces parties centrales, la commune s’étend dans cinq directions principales. L’une est sur la rive gauche, traversée par la rocade du boulevard de l’Europe qui relie les deux ponts extrêmes, Mathilde en amont et Guillaume le Conquérant en aval; mais on y atteint assez vite Sotteville au sud-est, Le Petit-Quevilly au sud-ouest. Le jardin des plantes en marque la limite méridionale; la prison est vers l’ouest, la petite «zone urbaine sensible» de la Sablière vers l’est; deux gares de marchandises flanquent cette rive gauche le long de la Seine. En direction de l’ouest, le territoire communal s’étend assez loin sur les deux rives de la Seine, dans le fief du Port Autonome. Au sud, il empêche le territoire du Petit-Quevilly d’aller jusqu’à la rive et comprend les grands bassins aux Bois et de Rouen-Quevilly, dotés des terminaux papetier et forestier, ainsi qu’un centre tertiaire portuaire et une zone industrielle. Rive droite, il englobe le débouché de la vallée du Cailly et va jusque sous Canteleu; là sont le bassin principal, Saint-Gervais, ainsi que le marché-gare d’intérêt national et le Musée maritime. Depuis 2008 un nouveau pont levant Gustave-Flaubert sur la Seine, emprunté par la N1338, a été équipé de deux tabliers parallèles qui peuvent monter à 55 m au-dessus de l’eau pour laisser passer les plus grands navires, ce qui n’arrive pas souvent hors maintenance. Au nord du centre-ville, l’espace est mesuré; la gare de voyageurs de Rouen s’y coince entre deux tunnels, et les habitations grimpent sur les pentes du plateau de Caux. Une assez grande extension de la commune va vers le nord-est et colonise les plateaux par le Vallon Suisse et son grand cimetière, puis le quartier des Sapins; un grand ensemble d’HLM campe sur une portion de plateau strictement délimitée par des vallons et, à l’est, par la vallée du Robec; ses rues ont des noms de musiciens au sud et de savants au nord, mais «le Plateau» (quartiers du Châtelet, de Lombardie, des Sapins et de la Grande Mare) est classé en zone urbaine sensible et s’est même vu doter en 2004 d’un statut de zone franche. Une autre digitation, vers l’est, s’insinue dans la vallée du Robec entre les communes de Bonsecours au sud et de Darnétal au nord-est; elle accueille échangeurs et nœuds ferroviaires, tandis que l’A28 s’enfonce en tunnel au nord sous le Plateau; quelques institutions s’y sont glissées, comme l’École d’architecture et les Archives, ou le dépôt des bus de Rouen. En partie malgré la proximité de Paris, en partie grâce à elle, Rouen est une ville active dans le domaine culturel et scientifique. L’Université n’a été créée qu’en 1966, mais elle couvre toutes les branches; elle fut amorcée par l’apparition d’enseignements de médecine dès 1955, de lettres et de sciences en 1958. Elle compte près de 30 000 étudiants en quatre campus: principalement celui de Mont-Saint-Aignan sur le plateau au nord-ouest du centre-ville (la moitié); à l’est du centre-ville dans le quartier de Martainville pour la médecine (1999, 5 300 étudiants); à l’ouest du centre dans le nouveau Pôle universitaire des sciences du tertiaire ou PUST, avenue Pasteur, pour le droit et les affaires (2001, 5 800 étudiants); et plus récemment assez loin au sud pour une partie des sciences dans le technopole du Madrillet à Saint-Étienne-du-Rouvray (1 700 étudiants); s’y ajoutent 1 300 étudiants à Évreux (IUT), 340 à Elbeuf. Rouen dispose d’une quinzaine de musées, d’autant de théâtres dont une scène nationale, et d’un opéra. Elle organise des festivals, notamment du Cinéma nordique et du Livre pour la jeunesse, et réunit périodiquement des grands voiliers lors de la très spectaculaire Armada. Elle honore ses célébrités, dont les principales furent sans doute Corneille (1606-1684), l’explorateur Cavelier de la Salle (1643-1687), Fontenelle (1657-1757), Boieldieu (1775-1834), Géricault (1794-1824) et Gustave Flaubert (1821-1880). Un «métro» part du nord du centre, au Boulingrin sur les boulevards, et irrigue en deux branches les deux grands ensembles de banlieues de la rive gauche, l’une jusqu’au sud du Grand-Quevilly, l’autre jusqu’au technopole du Madrillet. Plusieurs lignes de «métrobus», sorte de trolleybus ou tramway sur pneus, atteignent déjà Canteleu, Notre-Dame-de-Bondeville, Mont-Saint-Aignan et Darnétal. La dimension de la commune étant relativement faible, les principaux établissements industriels sont dans les communes de banlieue et Rouen au sens strict a assez peu d’industries. Les principales sont les lubrifiants Lubrizol (350 sal., racheté en 2011 par le groupe Berkshire de W. Buffet, site d’un grave incendie en 2019) et les lubrifiants Total (180 sal.); ingrédients alimentaires Nexira (65 sal.), fabrique de peintures et marquage Aximum (65 sal.); ingénierie Alpha (130 sal.). Le bâtiment est représenté par l’Office public d’HLM (180 sal.) et les Établissements publics fonciers de Normandie (EPF, 70 sal.), les constructions Bouygues (170 sal.) et les travaux publics du même groupe (100 sal.), les nettoyages Veolia Propreté (260 sal.), Transparence (55 sal.), le gardiennage Torann (70 sal.); la fourniture de chaleur Dalkia (EDF, 270 sal.), les distributions d’électricité Enedis (160 sal.), d’eau Veolia (160 sal.) et Sade (70 sal.); enlèvement et traitement d’ordures Veolia (500 sal.) Dans la logistique se signalent Euraports Manutention (60 sal.), les transports VFLI (150 sal.), Bolloré (130 sal.), NL (100 sal.), l’entreposage Eurodep (65 sal.), les transports urbains (TCAR, réseau Astuce, 1 180 sal.). Rouen accueille aussi Proman (150 sal., travail temporaire) et plusieurs entreprises d’aide à domicile: Bien à la Maison (130 sal.), Domidom (110 sal.), A2Micile (75 sal.), Solxis (75 sal.), L’Un et l’Autre (65 sal.), Domusvi (55 sal.)., O2 Rouen (50 sal.). Comme ailleurs, le Centre hospitalier mène de loin avec 6 800 salariés, auxquels s’ajoutent les 560 employés du centre de cancérologie Henri-Becquerel; trois cliniques emploient respectivement 440 sal. (Europe), 500 (Mathilde) et 400 (Saint-Hilaire), le Laboratoire d’analyses de Rouen 110 sal.; les maisons de retraite Korian Medotels Cent Clochers 90, Korian Villa Saint-Dominique 70 Korian les Bégonias (55 sal.), Tiers Temps 70. La commune accueille un centre Leclerc de 160 salariés, un Intermarché (70 sal.), et quelques grands magasins comme Monoprix (90 sal.), le Printemps (85 sal.), la Fnac (70 sal.), les Galeries Lafayette (50 sal.), Conforama (55 sal.), Brico Dépôt (80 sal.). Rouen est le siège des assurances Matmut (160 sal. à Rouen). Le Crédit Lyonnais a 75 sal., la Société Générale 140, la BNP 340, le Crédit du Nord 70; s’y ajoutent évidemment des sociétés d’informatique Sopra (120 sal.) et Proxiad (70 sal.) et de conseil dont Grant Thornton (65 sal.), Helpevia (60 sal.); services de bureau Phone Régie (70 sal.); formation d’adultes Segmo (50 sal.); location de linge-blanchisserie Maj du groupe Elis (320 sal.);pompes funèbres OGF (60 sal.). Dans les négoces apparaissent la distribution pharmaceutique Cerp (220 sal.), les négoces d’équipements pour automobiles Niort (200 sal.), de fournitures pour hôpitaux Oxypharm (250 sal.), d’habillements Hollister (50 sal.); le garage Renault a 230 sal., France-Télévisions 130, La Poste 220. La commune a eu 87 000 hab. au début du 19e siècle, 116 000 à la fin; elle est montée à 125 000 en 1911 et son maximum d’après-guerre s’est établi à 121 000 en 1962 (sdc): elle s’est ensuite dépeuplée jusqu’à un minimum de 101 900 hab. en 1982, et a regagné des habitants depuis, dont 3 840 depuis 1999. La commune de Rouen ne forme donc pas un quart de son agglomération. La communauté d’agglomération de Rouen-Elbeuf-Austreberthe, devenue Métropole de Rouen Normandie, rassemble 71 communes et 489 400 hab. L’unité urbaine Insee est donnée pour 467 800 hab. (50 communes), l’aire urbaine pour 66 250 hab. (274 communes sur 236 600 ha). L’arrondissement a 631 000 hab., 217 communes. Trois nouveaux cantons ont Rouen pour bureau, chacun avec un tiers de la commune (37 700, 35 400 et 37 000 hab.).
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