collectivité territoriale (région et département) de l’outre-mer français dans les Antilles. L’origine du nom est mal connue; elle est parfois rattachée à Madininia, qui aurait désigné «l’île aux fleurs» en caraïbe; d’autres disent qu’en 1502 Christophe Colomb l’aurait vue et nommée un jour de Saint-Martin… La Martinique est une île de 1 128 km2, et ainsi la plus petite des régions françaises; mais non le plus petit département, puisqu’elle est presque deux fois plus étendue que le Territoire de Belfort et dix fois plus que Paris. La population, officiellement 365 700 hab. en 2023, est très dense: 324 hab./km2 alors qu’un tiers seulement de la surface est utilisé. La croissance a été nette avant 2000: 381 000 hab. en 1999 contre 360 000 en 1990 et 329 000 en 1982, soit +2 000 personnes par an. Mais la Martinique subit depuis 1999 le plus fort déficit démographique de toutes les régions françaises, en grande partie lié au départ des jeunes, avec une réduction annuelle de 10‰, due à un déficit migratoire de -12‰ et un solde naturel abaissé à +2‰ sur la période, le taux de natalité étant un peu inférieur à 10‰, le taux de mortalité d’environ 8‰, avant même la pandémie de la Covid. En 2021, la Martinique a eu plus de décès (4 600) que de naissances (3 600). L’émigration vers la métropole a provoqué un déséquilibre des sexes: les femmes sont 20 000 de plus que les hommes (10%). La Martinique a 34 communes et 4 arrondissements, Fort-de-France (préfecture), Saint-Pierre, La Trinité et Le Marin (sous-préfectures). Ses communes sont associées en trois communautés d’agglomération, Nord, Centre et Sud, sur la base des arrondissements, celle du Nord groupant les deux arrondissements de Saint-Pierre et de La Trinité. Le statut est celui d’une collectivité territoriale de la République depuis 2016, à la fois département et région ultrapériphérique de l’Union européenne. Le département n’a plus de canton: les 51 conseillers territoriaux sont élus dans les 4 circonscriptions législatives, qui correspondent aux arrondissements, la règle habituelle de parité des genres n’étant pas appliquée; l’assemblée actuelle compte néanmoins 22 femmes sur 51 membres. Le conseil exécutif est de 9 membres, dont 4 femmes. La Martinique est située par 14°40’N et 61°00 O, entre océan Atlantique et mer des Antilles (ou Caraïbe) sur l’arc externe des Antilles; elle a pour voisins la Dominique (71 000 hab.) au nord et Sainte-Lucie (165 000 hab.) au sud, États indépendants mais membres du Commonwealth britannique. L’île a été peuplée par des Arawaks il y a environ 7 000 ans; ils ont été pourchassés et expulsés par des Caraïbes à partir des environs de l’an 1000. Le premier groupe de Français, une centaine de personnes, y a débarqué en 1635 à la faveur de la création de la Compagnie des Isles d’Amérique par Richelieu; après plusieurs conflits et insurrections, ils ont fini par éliminer ou chasser les Caraïbes en 1658. Les colons se sont rapidement orientés vers la production de denrées tropicales et ont importé sur leurs plantations les premiers esclaves noirs dès 1642; un Code Noir régissant l’île a été promulgué en 1685 à l’instigation de Colbert. Après la suppression de l’esclavage en 1848, les planteurs firent venir plus de 25 000 personnes originaires de l’Inde, surtout dans le nord, pour continuer à se pourvoir en main-d’œuvre bon marché. La Martinique a connu plusieurs assauts et occupations par les forces britanniques, notamment à l’époque napoléonienne, plusieurs révoltes d’esclaves avant 1848, et une première grève d’ouvriers agricoles en 1900. La vie politique est restée tendue, les mouvements anticoloniaux sont suivis et organisés. Aimé Césaire (1913-2008), grande figure de l’île, a contribué à les structurer, en fondant en 1958 le Parti progressiste martiniquais après avoir rompu avec le Parti communiste français; la Martinique a produit quelques autres grandes figures intellectuelles, dont les plus connues sont Frantz Fanon (1925-1961), Édouard Glissant (1928-2011) et Patrick Chamoiseau (né en 1953). L’île de la Martinique mesure 65 km du NNO au SSE, 22 km de large hors la presqu’île de la Caravelle qui se détache à l’est. Comme ses voisines, elle oppose une côte «au vent», à l’est au bord de l’Atlantique, exposée au souffle des alizés, et une côte «sous le vent», abritée, sur la mer des Antilles à l’ouest, où se sont installées les capitales. Il y en eut deux: les premiers colons avaient promu le site de Saint-Pierre, longtemps la capitale économique et culturelle de l’île, mais anéantie en 1902 par l’éruption de la Montagne Pelée. Les militaires lui avaient préféré le site de Fort-de-France, devenue capitale administrative et stratégique dès 1692 sous le nom de Fort-Royal, et seule métropole complète après 1902. Le contraste des deux côtes est accentué par le relief, qui culmine à 1 397 m. L’île, comme ses voisines, est d’origine volcanique. Elle est située sur l’arc externe de la plaque caraïbe, et le volcanisme y est récent. Seules les deux excroissances de la presqu’île de la Caravelle à l’est et de Sainte-Anne au sud-est sont un peu plus anciennes (oligocène, entre 30 et 20 millions d’années) et ont conservé des dépôts coralliens anciens formant des bancs calcaires. Le reste est d’âge miocène au sud, du Vauclin et du François aux Trois-Îlets (10 à 20 millions d’années), et de plus en plus récent vers le nord-ouest (moins de 10 millions à aujourd’hui), c’est-à-dire vers la Montagne Pelée, toujours active. Enfin, la dépression du Lamentin et de Rivière-Salée, au fond de la grande baie de Fort-de-France, a été remblayée par des alluvions récentes prolongées par une mangrove. Ces reliefs portent une végétation tropicale abondante et diversifiée, mais très modifiée par des siècles de fréquentation et de plantations. Sa composition est moins sensible aux altitudes, généralement modérées, qu’aux différences de pluviosité liées à l’exposition aux alizés: le nord-est est très arrosé, le sud-ouest beaucoup moins. De ce fait, les grands espaces de plantations actuelles sont principalement sur les basses pentes du nord-est, surtout s’il s’agit de bananiers. L’île a connu plusieurs cycles de cultures dominantes selon la demande métropolitaine, passant par le tabac et le café, la canne à sucre, plus récemment la banane et l’ananas. La production agricole reste une base de l’activité, organisée par des domaines de taille moyenne ou grande (les «habitations»). L’industrie n’a jamais dépassé le stade de la première transformation de produits agricoles, surtout à partir de la canne à sucre. Bien que les bananeraies dominent, la culture de la canne reste active, la Martinique conservant une sucrerie et plusieurs distilleries de rhum. Les autres activités productives ne portent guère que sur la construction et la menuiserie, plus quelques biens de consommation: eau de table, une laiterie, quelques petits ateliers de confection ou de réparation. La pêche n’a qu’une dimension locale, avec moins de 3 000 actifs, et ne suffit même pas aux besoins de l’île. Tout le reste relève des services divers, où garages d’automobiles, sociétés de crédit, d’assurance et de gardiennage prennent la plus grande part, avec l’accueil touristique. L’île est doublement dissymétrique: à l’opposition climatique des deux côtes s’ajoute une opposition nord-sud, le nord étant plus élevé, plus accidenté, plus arrosé, relativement peu fréquenté et tendant à se dépeupler, tandis que le sud, plus ensoleillé et plus accessible, concentre les installations et les fréquentations touristiques, ainsi que les croissances démographiques. La division en quatre arrondissements, assez récente, permet une assez bonne approche des différences majeures. L’agglomération de Fort-de-France concentre à elle seule 43% de la population de l’île, et assure plus de la moitié de ses salaires. Le Sud tire le meilleur parti du tourisme et sa population croît nettement, mais son agriculture est marginale. La côte orientale réunit le plus grand nombre de plantations, qui ont conservé vers le nord des descendants d’Indiens d’Asie, et elle est appréciée par les visiteurs en raison de la diversité de ses sites, ce qui lui assure une autre forme de tourisme, plus diffus. Sur les pentes en arrière des plantations, subsistent des terroirs de hameaux et microfonds agricoles, qui forment comme une longue «diagonale des mornes» du Vauclin à Ajoupa-Bouillon, à peu près sur la crête d’interfluve Atlantique-Caraïbe. Le Nord, surtout côté caraïbe, est certes visité, mais moins accessible et bien moins cultivé; ses activités sont plutôt morcelées, sa population est en déclin. Les liaisons les plus intenses se limitent aux deux axes qui relient la capitale au Robert et à La Trinité vers l’est (N1), à Rivière-Salée et au Marin vers le sud (N5). Les autres traversées sont certes pittoresques, mais très laborieuses, y compris la route littorale de Fort-de-France à Saint-Pierre; à l’extrémité nord-ouest de l’île, il n’y a même plus de route le long du rivage. Les sentiers (traces) s’ouvrent aux randonneurs, qui ne sont pas en foule. La surface agricole utilisée n’est que de 21 900 ha (19% de la surface totale), dont 7 500 pour les bananeraies, 4 000 pour la canne à sucre, 4 800 pour les autres fruits et légumes; s’y ajoutent 7 500 pour les prairies. Le nombre d’exploitations agricoles est passé de 18 500 en 1980 à 7 800 en 2000, 2 600 en 2020, employant 5 400 actifs permanents plus 300 saisonniers. La production de bananes a culminé à 257 000 t en 2002 mais baisse depuis: 142 000 t en 2021, presque tout étant exporté. La Martinique traite 210 000 t de canne à sucre, les 7 distilleries produisant 83 000 hl d’alcool dont 68 000 hl d’alcool agricole (rhum). L’île compte 14 000 bovins dont seulement une centaine de vaches laitières, 9 000 porcins, 3 400 caprins, 7 500 ovins, 470 000 volailles. Elle a 47 000 ha de forêt dont 33 000 privés; la mangrove s’étend sur 1 840 ha. Le produit brut total de la Martinique est évalué à 9,1 milliards d’euros, soit environ 25 600 € par habitant (France 36 900), un record pour l’outre-mer; et l63 000 par emploi (France 83 700). La Martinique est également le premier des départements d’outre-mer par la richesse moyenne et le niveau d’éducation, et celui qui a le plus faible taux de chômage (13%). Parmi les actifs, 4% sont dans l’agriculture, 6% dans industrie, 5% dans la construction, 44% dans le tertiaire marchand et 39% dans le tertiaire non marchand — la France ayant respectivement 2, 11, 7, 50 et 30% dans les mêmes secteurs. Les recettes apportées par les 700 000 «touristes» sont évaluées de 4 à 7% du produit brut. |